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  26. La dernière tentation
 




Chapitre XXVI                                           La dernière tentation


Elle était vraiment belle quand elle dormait.
L’amante d’un soir est émouvante dans l’abandon du sommeil, la femme amoureuse, elle, est magnifique.
En appui sur un coude, le Comte de Fersen regardait ce petit miracle de précision : le dos d’albâtre soulevé d’un souffle régulier et calme. Recommençant à l’infini son manège enchanteur.
Vraiment très belle.
D’une main légère il caressa les boucles éparses sur l’oreiller, sourit aux images fantasmagoriques de leur nuit, qui ne remontaient en fait qu’à quelques heures ; cette grâce dans l’amour, cette fougue…Elle avait la rudesse propre à son éducation masculine, l’effronterie qu’ont les âmes pures, la douceur de sa nature de femme. Elle s’était offerte, et il n’aurait eu qu’à cueillir cette fleur sauvage pour la faire sienne. Complètement.
Et il ne l’avait pas fait.
 
Par amour, par folie peut-être, quelle importance…
« Je vous aime… »
Lorsqu’elle avait abdiqué, au moment précis où elle avait prononcé ces trois mots une sorte d’éblouissement l’avait saisi, une vision : celle d’une élégante demeureà l'Ouest de Stockholm, sur les rives du lac Mälar, où cet ange aurait illuminé de sa blondeur les longs hivers scandinaves.
« Je vous aime… »
Avec quelle virulence il s’était retenu pour ne pas lui répliquer : « alors épousez-moi ! » Quelle folie oui, quelle hérésie que cette phrase qui peut-être aurait tout détruit.
La main amoureuse quitta la flamboyance de la chevelure, se laissa tenter par le tracé d’une épaule pour mieux venir conquérir l’omoplate, l’effleura du bout des doigts. Oscar frémit sous ce contact éphémère, soupira d’aise à travers ses rêves.
Sa femme…quelle incroyable folie en effet.
Sentir son cœur bondir à chaque minute de son existence, incrédule de voir cette indomptable s’assagir par amour, se couler dans un rôle que la nature avait pourtant prévu pour elle, redevenir femme, épouse, puis mère…Le Comte ferma un bref instant les yeux sous cette captivante tentation : un enfant. Petit rejeton d’une plante splendide, une perfection de blondeur à n’en pas douter, qui lui aurait animé la demeure familiale de ses rires et de ses courses échevelées. Folie…
 
Comme si la nature d’Oscar était faite de ce même matériau, propre à s’épanouir dans l’obscur éclat d’un bonheur domestique.
Nature qui ne pourrait non plus se contenter de l’avilissant rôle d’amante en titre d’un noble gentilhomme suédois…
Peut-on soumettre un astre, en stopper la marche par quelque dictature que ce soit ? Oscar était une force, une pure énergie qui jamais ne pourrait se contenir dans aucun moule prévu par sa caste. Aurait-elle dit oui, d’ailleurs…Aurait-elle accepté la prison dorée du mariage ? Peut-être.
Son cœur lui soufflait même « sûrement », et cela le déchirait. Oui, elle l’aurait suivi et lui-même aurait tout abandonné, prêt à tous les sacrifices pour construire cette vie d’illusion. Car un beau jour, un matin, il savait déjà qu’il le surprendrait ce regard insoutenable : une nostalgie, muette, une larme couleur d’océan se perdre à travers la vitre pour contempler sa vie passée, sa vie d’homme, sa liberté à jamais perdue ; puis ce sourire à l’insondable tristesse en se tournant vers lui, lorsqu’elle le réconforterait d’une douce imposture. Non, bien sûr que non elle ne regrettait rien…
Et ce serait faux, et lui sourirait pareillement en faisant semblant de croire à ce mensonge silencieux.
Ce regard il ne le voulait pas, jamais.
Pas d’elle.
 
Et puis… comment songer que leurs destins puissent se rejoindre un jour ?
Lui devait poursuivre la vie qui était la sienne, sans attaches, vivant ces lendemains de hasard emplis de dangers obscurs.
Et elle, vivre dans la lumière de son imposture. A jamais garçon mais dans le cœur la certitude d’avoir été femme, grâce à lui.
Sa main vagabonde glissa sans hâte, repoussa délicatement le drap ; dévoila doucement une éblouissante chute de reins. Admiratives, les prunelles gris-bleu vinrent se perdre au creux de la taille fine, s’étourdir de ce grain de peau délicat, malgré quelques estafilades témoignant d’une témérité décidément trempée dans les flammes de l’enfer. Il les toucha d’un délicat respect ces cicatrices, redessina celle qui méandrait contre une de ses côtes, mais continua sa route quand le tracé en fut fini pour continuer plus bas, toujours un peu plus à chaque effleurement. Elle eut un petit gémissement, très doux, comme les enfants qui se régalent d’une friandise longtemps convoité. Et se mit à bouger, de manière infime, s’étirant tout doucement pour resserrer son étreinte autour de l’oreiller de dentelles comme autour du corps d’un amant.
 
Oui, il l’avait faite jouir cette nuit. Sans jamais penser un instant à sa propre jouissance, se délectant plutôt de voir ce corps naître à l’extase, et cette voix prononcer son nom d’une sauvage tendresse.
Une voix qui redevenait féminine dans les troubles tourments de l’amour, qui l’avait supplié sous la douce torture de sa bouche, non pas d’arrêter mais de poursuivre, jusqu’à ce cri émerveillé qu’elle n’avait pu contenir la laissant épuisée, heureuse, comblée. Mais avant de trouver refuge dans ce sommeil qui l’enveloppait encore à cette seconde, elle avait exhalé un simple mot : « merci »…
Elle n’avait pas dit « je t’aime », juste cela, puis s’était assoupie dans un sourire.
 
Pourquoi ? Le remerciait-elle de ce plaisir donné, jusqu’alors inconnu ? Ou lui était t-elle reconnaissante de l’avoir laissé intacte, fleur à jamais sauvage dont il avait froissé quelques pétales mais dont le cœur restait pur…A moins que par ce mot elle ne comprenait déjà elle aussi ; devinant obscurément que leurs étreintes ne pouvaient être qu’éphémères.
Car ils se ressemblaient tant au fond, aussi indépendants, aussi insoumis l’un que l’autre.
Alors, quand cette fleur vierge de toute passion s’était offerte à lui, prête à s’ouvrir toute entière sous l’ardeur de ses baisers, il l’avait provoqué. Avait attisé sa gêne puis son orgueil, son désir enfin, pour bousculer ses certitudes et lui faire perdre peu à peu ce contrôle auquel elle était si fort attaché. Car cet amour qui lui dévorait l’âme il le voulait ainsi, à leur image : libre, affranchi de toute loi.
Et ne lester ce corps superbe d’aucunes chaînes, ni morales, ni charnelles ; seulement lui offrir tout le plaisir dont il fut capable, le souffre de ses caresses et un parfum d’absolu dans chacun de ses baisers.
Mais n’irait pas plus loin, il se l’était juré.
 
Le Comte se pencha, ne pouvant plus se contenir d’embrasser tendrement ce dos si tentateur, y laissa l’empreinte vaporeuse de son sourire tant cette peau chaude et douce l’enivrait… tandis que le drap continuait sa course paresseuse, dévoilant la tendre naissance des fesses.
Oscar soupira.
Ses reins se creusèrent, un tout petit peu, puis son corps tout entier quand elle quitta peu à peu les limbes.
 
_ « Mmmm…quelle heure est-il…Fait-il jour, déjà ? »
Ce ton de contrariété un peu enfantine le fit sourire.
_ « Minuit n’est passé que depuis peu, et il fait toujours nuit noire. Tu n’as fait que t’assoupir cher ange. »
 
Elle s’étira, se remettant sur le dos avec une inconsciente volupté qui fit bouillir le sang du jeune homme. Oscar possédait un pouvoir sensuel redoutable car totalement involontaire, une grâce dans le geste lorsqu’elle élevait ses bras pour hausser davantage des jeunes seins déjà délicieusement insolents.
Ce geste, c’était celui-là même qu’elle avait eut un soir de cuite, quand dans son ivresse il l’avait aidé à défaire son gilet. C’était cette même volupté qui l’avait bouleversé, allumant dans son cerveau un signal lui montrant combien ce corps recelait de charme et de danger, de secrets propres à transpercer le cœur d’un homme.
Aussi il ne fut pas long à venir voir de plus près cette si jolie poitrine.
Il eut droit à un sourire brumeux doublé d’un soupir d’intense satisfaction, ce dernier le plongeant dans une profonde réflexion métaphysique : la chair est faible quand l’homme ne sait plus à quels seins se vouer…
 
_ « C’était merveilleux… » murmura Oscar, épanouie.
La main fine de la jeune fille vint vers sa joue, caressa amoureusement le tracé aristocratique de la pommette, la séduction de ses lèvres. Qui ne purent rester bien longtemps loin des siennes, en de doux contacts emplis d’ardeur contenue pour ne pas la brusquer.
Enfin c’est ce qu’il crut.
Habituée aux prises de décisions militaires sans doute, elle établit sans crier gare une douce riposte. Enflammant ses lèvres à mesure que le sommeil la fuyait, Oscar partit brusquement à la découverte de ce corps follement viril, entreprise dont elle avait été détournée de manière intensément sulfureuse.
Découvrant que le toucher remplaçait avantageusement la vue  ses mains étreignirent les muscles durs des épaules, du dos, qu’elle griffa presque tant elle désirait incruster ce corps contre le sien. Puis ses doigts tremblants d’impatience descendirent encore, s’insinuèrent sous le drap, furent un instant surpris de découvrir la barrière du pantalon ; un instant seulement, indomptables ils plongèrent dans la ceinture, voguèrent à pleine vitesse vers le chaud récif fièrement dressé et voulurent se perdre dans la luxuriance intime…quand une poigne d’acier stoppa brutalement leur progression. Sans appel.
 
Interdite, la jeune fille ouvrit de grands yeux, contempla ce mâle visage à l’absolue détermination pour y découvrir comme une douleur, une tristesse démesurément tendre exprimée dans un sourire très simple.
_ « Non Oscar. Pas de cette façon… » Il ramena sa main à ses lèvres, embrassa les doigts fuselés sans la perdre du regard. « Vous comprenez, n’est-ce pas ? »
 
Oui. Elle comprit.
Tout du moins l’espérait-il…Grâce à ce vouvoiement retrouvé, à la très légère fêlure de sa voix grave.
Il pria pour qu’elle comprenne l’inexprimable, le tourment à jamais attaché à leur amour. Oui, il était sûr qu’elle comprenait.
Elle sourit en tout cas, fière, orgueilleuse, brûlante de désir mais semblant accepter l’interdit qu’il lui offrait, puisque cela n’était que pour quelques heures encore.. Guida cette paume contre son cœur pour qu’il en sente les battements chavirer uniquement par lui, qu’il sente la pointe de son sein s’éveiller et se durcir sous sa seule caresse, qu’il la rende à sa nature de femme, encore une fois. A sa manière.
Oscar laissa retomber ses bras en croix contre le lit, soupira de plaisir en s’offrant sans condition au bien-être de se laisser aimer, adorer, honorer…
 
Elle ne put néanmoins s’empêcher de demander au bout de quelques minutes :
_ « Hans…puis-je vous poser une question ? »
_ « Mmm… » acquiesça une voix près de sa hanche.
_ « Combien de femmes avez-vous connu avant moi ? »
_ « Quoi ?!! »
Oscar fut heureuse de sa découverte : l’effet de surprise offrait d’indéniables voluptés quand il s’accompagnait de la sorte d’un souffle tiède contre sa peau nue.
_ « Dites-le moi, je vous en prie. J’aimerais savoir… »
_ « Oscar !! Non mais vous plaisantez j’espère !!! »
Elle regarda les prunelles d’aube pâle d’un air faussement ingénue.
_ « Et pourquoi ? Je veux bien croire que vous jouiez la comédie quand à votre réputation de séducteur mais…vous avez tout de même dû en séduire bon nombre pour acquérir tant de science. »
_ « Oscar !!! »
_ « Et quoi, « Oscar » !! Je ne vois pas ce que ma question a de choquant…Je vous en prie dites-le moi, je veux savoir. Hans, je veux savoir… »
Le Comte la regarda d’un air éminemment suspicieux : elle commençait à savoir diablement bien jouer de son charme. Bon sang…quand elle croquait ainsi ses lèvres en lui coulant ce regard lumineusement enjôleur, il n’avait qu’une envie à défaut de vouloir lui répondre, celle de la prendre sur-le-champ et la faire sienne, sans sommation…
 
_ « Non mais dites donc… » bougonna t-il pour endiguer ce désir envahissant. « Bien sûr qu’elle est choquante votre question !! A-t-on idée de demander pareilles choses?! »
Apparemment bien décidée à ne pas entendre raison elle se coula vers lui, et toujours aussi redoutablement armée supplia et cajola à n’en plus finir. Tant et si bien qu’elle se retrouva bientôt tout contre lui, sans qu’il comprenne clairement comment d’ailleurs.
_ « Je vous en prie, Hans… » répéta t-elle encore. Contrarié au dernier degré, il s’aperçut soudain que la jolie poitrine s’écrasait à présent souplement contre son torse, lui offrant une vue certes impérissable mais également désastreuse pour les hauts principes qu’il s’était imposé. Fondant littéralement sous ces yeux enchanteurs et ces deux petits seins narquois le Comte se dit qu’elle était décidément beaucoup plus maligne que lui.
_ « Bon, et alors…qu’est-ce que vous voulez savoir à la fin. » maugréa t-il, jouant les hommes furieux pour ne pas la couvrir de baisers.
_ « Et bien…A quoi ressemblait votre première conquête ? Comment s’est passée votre première nuit d’amour, Hans ? »
_ « Mais bon sang Oscar, qu’est-ce qui vous prend !!! »
_ « Mmm…j’aimerais savoir, c’est tout. »
Fersen pensa à cet instant que tout cela allait délicieusement mal finir, dégénérant irrémédiablement vers ce qu’il ne voulait pas, ou plutôt voulait de manière désespérée depuis quelques secondes, c’est-à-dire faire l’amour jusqu’à plus soif à cet ange transformé en démon de tentation. Et tant pis pour les conséquences. Crispant ses mâchoires il se retint de justesse, et décida que pour s’en sortir il n’avait d’autre choix que de répondre à sa curiosité bizarrement tournée. Excédé il se replongea dans ses souvenirs…et éclata de rire.
 
_ « Quoi !! » s’exclama Oscar, stupéfaite.
_ « Vous voulez vraiment savoir ? »
_ « Mais…oui, évidemment !! »
_ « Eh bien vous l’aurez voulu : figurez-vous que ma première expérience galante fut le plus beau ratage de toute l’histoire de Suède et de ses environs immédiats ! Voilà, vous êtes contente ? »
Non, apparemment pas, car il perçut la pointe effrontée de ses seins martyriser son torse quand elle s’agita pour lui réclamer moult détails. La supériorité de la femme sur l’homme était indéniable à cet instant…
_ « Alors ? Que s’est-il passé ? Et qui était-ce, d’abord ! »
Il soupira, bénissant son pantalon comme un allier supplémentaire contre cette fontaine aux questions dans laquelle il mourrait de sombrer corps et biens.
_ « Une des caméristes de ma mère. »
_ « Comment s’appelait-elle ? »
_ « Qui, ma mère ? »
_ « Hans, ne plaisantez pas !! Je veux savoir… »
_ « Ingrid, là ! Vous êtes satisfaite ? Bon, et si je continuais plutôt ce que j’étais en train de faire, ce ser…»
_ « Ingrid…C’est très joli. Cela a-t-il une signification ?»
_ « Oui, cela veut dire « jeune cavalière » en langue scandinave ; ce qui d’ailleurs lui allait parfaitement bien car s…enfin peu importe. Reprenons plut…  »
_ « Et alors, dites-moi comment cela s’est passé ! »
 
Fersen leva les yeux au Ciel, excédé. Malgré son éducation de garçon Oscar était bel et bien une fille d’Eve, redoutable de ténacité quand il s’agissait de sujets…épineux.
_ « Je vous l’ai dit : ce fut un épouvantable naufrage. Je n’ai rien d’autre à ajouter. »
_ « Ah, pardon !! Vous n’allez pas vous en tirer comme ça, je veux connaître les détails. »
_ « Oscar !! Mais il n’en est pas question !! »
_ « Oh…s’il vous plaît… »
Ça c’était le comble, plus elle s’agitait plus d’inavouables idées l’assaillaient...Après tout, peut-être que se remémorer cet épisode navrant sans trop entrer dans les détails justement calmerait ses ardeurs dévorantes…
_ « Bon… Et bien le jour de mon anniversaire, cette jeune personne voulut m’offrir un cadeau d’un genre très particulier : ses…oui enfin vous voyez. Comme je ne savais comment m’y prendre, je fus parfaitement lamentable : j’étais si nerveux qu’une certaine zone de mon anatomie partit aussitôt en vrille, exprimant sans attendre et avec force toute l’ardeur qu’elle m’inspirait. Je fus à ce point honteux que je me suis enfui sur-le-champ ! Certains domestiques doivent même encore se souvenir de l’espèce de fou qu’ils ont croisé, les fesses à l’air, traversant les couloirs comme s’il avait le diable aux trousses…Le seul problème c’est qu’en voulant regagner mes appartements je me suis trompé d’étage tant ma confusion était grande, ce qui fait que j’ai déboulé, quasiment nu, dans le salon où ma mère prenait le thé en compagnie de toutes les vieilles rombières de la haute société suédoise »
Malgré l’effroyable scène et les évanouissements en pagaille qui avaient suivi, le Comte ne put s’empêcher de rire de bon cœur à cette évocation. L’année de ses treize ans, quel scandale ! 
 
Aucun rire ne fit écho au sien, et c’est bien ce qui l’inquiéta : elle le fixait de ses yeux irrésistiblement brillants, heureuse de ces confidences et par là même intolérable d’inconsciente séduction…
Bon sang, il la désirait encore plus à cet instant. Sa bouche, au tracé plein, avivée par leurs baisers…Fersen serra le poing, pour ne pas se ruer vers la ceinture de son pantalon.
 
_ « Et était-elle jolie ? »
_ « Pa…pardon ? » mâcha le jeune homme, infiniment plus attentif aux mouvements de ses lèvres qu’à se qu’elles disaient réellement ;
_ « Cette Ingrid, était-elle plus jolie…que moi ? »
Le Comte sentit son cœur faire une embardée soudaine: bon sang, mais elle était jalouse ma parole !!
Voilà la raison réelle de cette inquisition dont les motivations lui échappaient!
Une découverte bien loin hélas de lui apporter le moindre réconfort : au contraire, son sang ne se mit que plus sûrement à bouillir face à ce sursaut on ne peut plus féminin. Et ce maudit pantalon, devenant de plus en plus intolérable…
_ « Alors ! A quoi ressemblait-elle, votre Ingrid ? »
Il essaya l’autorité.
_ « Bon maintenant ça suffit Oscar ! Cette conversation est ridicule. »
_ « Pourquoi ? » demanda t-elle ingénument. « J’en sais si peu sur vous, aussi ma curiosité est on ne peut plus légitime il me semble. »
_ « Non, justement non ! Et …et vous me décevez même énormément avec vos enfantillages.»
_ « Ah oui ? »
 
Elle en fut extraordinairement affectée visiblement, puisque son sourire enjôleur s’intensifia tandis qu’elle se coulait plus étroitement contre lui. Il sentit la brûlure de son corps contre le sien, et l’étroitesse de son vêtement ceignant ses reins par delà le drap prit des proportions dramatiques. Tout juste s’il n’eut pas la sensation que le tissu allait exploser sur-le-champ, envoyant les boutons aux quatre coins de la pièce.
Il ferma les yeux et broya ses mâchoires, tâchant désespérément de contenir la savoureuse pulsion.
_ « Alors, elle était comment votre camériste ? »
_ « Bon sang Oscar, allez-vous vous taire… » murmura t-il d’une voix sourde…et le sourire aux lèvres.
_ « Pourquoi ? » répéta plus doucement cette traîtresse. « Je veux juste savoir si votre Ingrid était belle, je ne vois pas où est le mal. »
Rouvrant ses paupières pour la noyer d’un regard passablement embué de désir, il se demanda précisément s’il elle ne le voyait pas au contraire parfaitement bien, le mal. Il fallait arrêter tout cela très vite, sinon ce ne serait plus de quelques baisers sur son corps dont il pourrait se contenter. 
_ « Et bien elle était extrêmement laide, voilà ! » articula t-il, le souffle raccourci. « Vous êtes contente ? Ingrid était hideuse pour tout dire, souffrait d’un pied bot et de verrues plantaires, sans compter sa bosse qu’elle dissimulait habilement sous une houppelande les soirs d’hiver !! Et mainten… »
Bonté Divine !!
 
Oscar éclata de rire, révélant encore mieux les richesses de son corps de nymphe.
_ « Je vois, elle devait être effectivement ravissante. »
_ « Pas du tout, c’était une sorte de Valkyrie à moustache. Bon, et maint… »
_ «  Et votre deuxième conquête, était-elle aussi ravissante ? »
_ « Oscar !! Je n… »
_ «  Votre nuit d’amour s’est sans doute mieux passée avec elle. Vous aviez quel âge ? »
_ « OSCAR !!! »
Sans plus pouvoir se contenir il la renversa et capta passionnément sa bouche, comme ce soir de bal où il avait saisi le premier prétexte venu pour la bousculer contre le mur et dompter ce flot de paroles. Ce fut pareil aujourd’hui, à la différence qu’elle ne se rebella pas et était nue, offerte, à sa merci…
Avec une tendre sauvagerie il lui bloqua les poignets contre les draps pour empêcher ses mains de venir de nouveau se glisser contre son torse, la tint prisonnière elle et ses charmes redoutables afin de ne pas perdre tout à fait la tête, pas complètement, même si sa bouche gagnait en ardeur à chaque seconde. Il devenait fou…Avec fougue il enfouit son visage contre la chaleur troublante de son cou, y déversa une véritable traînée de souffre jusqu’à parvenir à son sein dont il chercha la pointe avec passion, l’aspira, en dévora le galbe effronté de baisers, aurait poursuivi…si des gémissements ne parvinrent brusquement à sa conscience, l’arrêtant net.
 
Essoufflé il se redressa, découvrit ce qu’il s’était juré de ne jamais voir : le fin visage aux traits délicats magnifiés par l’extase naissante, l’appelant d’une prière muette. Qu’avait-il fait…
Il s’aperçut brusquement de la situation.
Son bassin était désormais soudés au sien ; pire il vibrait sans même qu’il le veuille, animé de souples mouvements comme autant de caresses faites à ce jeune corps.
Il était au creux de ses jambes, ses reins infligeant à ce sexe de femme une trop douce torture, l’ultime tentation à laquelle il aurait voulu résister, par amour pour elle. Et elle l’appelait, de ses yeux d’océan assourdis de brume, nimbés de ce voile né du plaisir, ce même regard qu’il devait lui renvoyer sans doute.
_ « Je ne dois pas… » réussit-il à articuler, sans que ne cesse son va-et-vient enchanteur. « Résiste-moi cher ange, je t’en prie. Je t’en supplie, dis-moi d’arrêter. »
_ « Continue mon amour… »
Il ferma les yeux, presque douloureusement. Ses mains se desserrèrent autour des poignets, glissèrent le long de la peau aussi douce qu’une soie, vinrent se perdre dans l’immensité sauvage de sa chevelure, l’agrippèrent comme un noyé.
_ « C’est une folie » gémit-il, accentuant son mouvement. « Tu le sais pourtant…que nous n’aurons jamais d’avenir ensemble… : bientôt je vais partir. Je le dois… »
_ « Je sais… »
_ « …nous ne nous reverrons sans doute jamais… »
 
Elle soupirait d’extase, laissait sa nudité frémir plus librement à chaque ondulation de leurs corps. Allait à sa rencontre, sertissant son corps dans le sien. Il essaya de résister éperdument, des larmes éraillant sa voix rauque.
_ « Alors refuse-toi, aide-moi à ne pas commettre ce que peut-être tu regretteras un jour. Dis-moi non avant que je ne puisse plus m’arrêter…»
_ « Non. Ne t’arrête pas. »
_ « Refuse-toi Oscar, il est encore temps. »
Des doigts fuselés se glissèrent contre son dos, descendirent en caresses serpentines jusqu’à la ceinture de son pantalon, s’insinuèrent dans l’étroit chemin que d’habiles compagnons ne tardèrent pas à élargir.
_ « Je t’en prie Oscar…»
Elle dénuda ses fesses, et il ne fut pas long à venir l’y aider pour retirer complètement l’odieux rempart contenant ses derniers scrupules.
A peine le vêtement abandonné au hasard qu’elle se saisit résolument de ses fesses de cavalier, à pleines mains, comme si elle ne supportait plus le moindre éloignement.
Il la submergea de baisers. Pour lui faire oublier la brève douleur quand il brisa sa virginité, qu’elle accorda d’un tout petit cri.
 
_ « Fous, nous sommes fous… » gémit-il. Puis ajouta au bout de quelques secondes : « Tu l’as fait exprès n’est-ce pas ? »
 
Il la contemplait, allant et venant très tendrement en elle. « Tu l’as fait exprès, de me provoquer… »
Elle acquiesça, à peine, son sourire ébloui parlant pour elle.
_ « Tu n’es qu’une jeune folle tu sais…et moi encore plus fou de t’aimer autant. »
Il la vit mordiller sa lèvre, mais cette fois pour contenir un bref gémissement de plaisir.
Elle se perdit dans le regard passionnément épris qu’il lui dédia, leva le menton de ce geste adorable dont il raffolait, fière et plus sublime que jamais dans la jouissance qui la possédait peu à peu. Fidèle à elle-même elle le défia presque.
_ « Non Hans, je ne suis qu’une femme. Une femme amoureuse…» dit-elle simplement, les larmes aux bords des yeux. Elle habilla son émotion de fierté. « Que croyais-tu, que j’étais jalouse de ta grosse Ingrid et de toutes tes innombrables et hideuses maîtresses ? Tu rêves…»
_ « Tu es vraiment impossible, tu sais. »
 
Chaviré, il l’étreignit passionnément tandis que ses reins firent monter soupirs et plaintes.
Et quand elle ne puis plus les contenir elle chercha sa main, la broya sans le quitter des yeux comme pour l’emplir de son image et de son souvenir. Certes ils n’avaient aucun avenir mais s’inventaient le plus merveilleux des présents à cette seconde. Pas un instant elle ne lâcha sa main, leurs doigts enlacés tout autant que leurs corps, mouillés de cette fusion magnifique et désespérée, où leur âme mise à nue communia avec une telle intensité qu’ils restèrent ainsi, au sommet même de la jouissance. 
 
Quand il se retira d’un doux mouvement qui fut encore une jouissance, il la regarda longuement, de sa séduisante fossette exprimant combien il la trouvait belle. Puis, sans hâte, vint tout contre son oreille.
_ « Merci… » murmura t-il très bas.
Et la serra très fort, pour lui faire oublier qu’il pleurait.





 
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