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  VII. La Paresse
 




VII

La Paresse
 
 
 

- « Oscar, je ne suis qu’un misérable ! Qu’ai-je fait, pourras-tu seulement me pardonner…et pourtant tu m’aimes ! Dis-le moi encore, je t’en prie ! »
Elle entendait ses questions, cette émotion qu’André jetait dans chacun de ses souffles pour la supplier de redire ces mots d’amour qu’enfin elle avait extrait de son cœur. Mais elle ne voulait pas s’y attarder, ne le pouvait plus car à présent c’était son corps qui imposait sa loi, tous ses sens éveillés. Le charme, la tentation…tout cela et bien plus incarné dans ce mâle visage, penché au-dessus du sien. André…objet de tous ses tourments et ses plus cruels délices, qui l’aimait depuis si longtemps ; et elle n’avait rien vu, rien compris. Tant de temps à s’écorcher, se faire mal. Et à présent il était là, si près…contre sa bouche…
- « Pardonne-moi Oscar, je t’ai fait souffrir… »

Elle l’entendait oui, mais l’azur de ses yeux se perdait dans le vaste horizon de ses propres sensations. Juste concentrée sur cette main aux doigts nerveux et virils, entre ses jambes, tout au creux, avec la sienne au-dessus qui n’en pouvait plus d’attendre qu’elle lui donne enfin ce qu’elle voulait, si ardemment. Mais elle ne bougeait pas cette main tant rêvée, qui n’était plus celle de ses mornes plaisirs fades et honteux. Tellement…réelle, charnelle.
Elle pesa sur cette large paume pour qu’elle vienne la posséder mais c’était toujours cette même voix grave qui la frôlait de ses pleurs.

- « Tu m’aimes, et je ne le savais pas ! J’ai cru te perdre, je devenais fou je ne savais même plus ce que je faisais. Ta colère…me blessait, me torturait au point que mes pires démons ont surgis sans que je le veuille ! Pardonne-moi Oscar, mon cher amour… »


Il l’aimait…André. Non plus son frère, ni son ami d’enfance. Jamais. Juste un homme qui trop brièvement l’avait faite frémir de plaisir dont elle percevait encore la brûlante intrusion dans son corps. Cette perception accélérait son pouls sans qu’elle puisse lutter, quelque chose sourdait et palpitait au-delà de sa faiblesse passagère comme une rage très gaie à le savoir là, si près qu’elle ne le distinguait plus.
La nuit dévorait cette chambre à présent, à mesure que le jour avait décliné sur leur affrontement et que montait sa fièvre au rythme des mots d’amour et de pardon à son oreille, chuchotés pour elle seule.
André…sa beauté virile à ses côtés, et qui disait la chérir, depuis si longtemps…
Elle tourna la tête et tenta de le dévisager, ne capta que cet Eden couleur émeraude. Tous les péchés se pulvérisaient, toutes les flammes de l’Enfer se noyaient dans cet éclat unique.
Elle, hier fier Colonel de Jarjayes n’était plus qu’une femme, aujourd’hui soumise à la plus belle des dictatures qu’imposaient ses sens.
Ses côtes se soulevaient par brèves saccades pour contenir le feu de ses envies, sans plus pouvoir s’arrêter.
Oscar essaya de détailler ses traits et ne vit qu’une masse de cheveux fous. Et elle voulait plus, beaucoup plus à cette seconde.

- « Je veux te voir. Je veux te regarder André, allume les chandelles pour que je te voie, complètement… »

Oh Dieu…cette voix contre sa joue, sensuelle, si basse qu’elle en devenait rauque.

- « Oui…oui mon amour… »


Il l’embrassait ou lui parlait, c’était devenu la même chose ; il l’effleurait de ses lèvres sans savoir perdus qu’ils étaient dans cette pénombre réconfortante. Mais elle c’était un brasier qu’elle désirait, brûler sa prunelle contre ce corps d’homme convoité au-delà des mots.
Elle soupira de contrariété lorsque sa main virile quitta la sienne posée tout contre son intimité, tressaillant tout de même sous la très brève caresse qu’il lui donna au passage.
Elle ne chercha pas à se couvrir, resta dans le désordre froissé de ses vêtements ouverts à respirer par à coup, dévorée d’impatiences. Lui…si proche, qui bougeait fébrilement avec les mains tremblantes sans doute, qui créait la lumière pour qu’enfin ils se savourent l’un l’autre du regard, avant tout autre chose. Oscar se redressa à demi, pour le voir revenir à elle comme le papillon attiré par la flamme. Lui aussi respirait avec difficulté, laissait courir l’éclat de ses désirs contre la peau laiteuse que sa chemise déchirée révélait, sur le pantalon à demi baissé.
Aurait-elle du en ressentir de la gêne…allait-elle commettre une folie, plus encore que celle du jeune homme ?
Oui, sans doute. Et pourtant obscurément elle voyait une logique implacable à tout cela, comme si le fait qu’elle fut là à demi nue face à lui était prévu de longue date, par une mystérieuse alchimie…
Lui s’était rajusté, un peu, portant toujours sa veste brune tel qu’il était entré dans ses appartements.
Oscar dévora cette silhouette imposante et revint vers le visage qu’elle se surprenait à trouver irrésistiblement séduisant désormais.

- « Tu avais raison. »
- « Quoi… »


Il parut sortir d’un état d’hébétude et la regarda à son tour, sans comprendre. Elle poursuivit d’une voix saccadée par cette envie dévorante qu’elle avait de lui.
- « Tu avais raison André. Les désirs…ne sont pas ridicules et inutiles comme je l’avais cru. Et qu’on ne peut pas lutter contre eux, c’était vrai…Je…il faut que je te dise…depuis des jours, des semaines… j’ai envie de toi, si tu savais ! Je te désire. Moi aussi j’ai cru devenir folle tellement c’était puissant et…interdit. Je ne comprenais pas…Jamais je n’avais ressenti ces choses, elles me semblaient contraires à tous mes principes ! Pourtant je voulais que tu me touches, je ne rêve que de cela depuis ce jour où je t’ai surpris nu dans cette grange à caresser ton corps, je…oh mon Dieu tu vas sans doute m’en vouloir mais tant pis, parce que tu avais raison c’était l’orgueil qui menait mon existence et à présent…à présent j’ai faim de tes caresses, j’en ai besoin…Et tu m’aimes. Alors prends-moi encore, viens ! »
Elle fut persuadée qu’il allait se précipiter vers elle, il esquissa ce geste mais un sursaut de volonté parut l’entraver douloureusement. A son profond et désagréable étonnement il recula du lit.

- « Oscar…, moi aussi je dois t’avouer quelque chose. Tout cela est ma faute…je veux dire le fait de me surprendre dans cette grange, de me montrer nu…c’est moi qui l’ai provoqué. C’est moi qui l’ai voulu et décidé ainsi.
Depuis le tout début. Parce que je t’aimais, je te chérie depuis ce jour où enfant tu m’es apparue comme dans un éblouissement sans fin, lorsque adolescente tu n’avais même pas conscience de cette beauté et cette force d’âme qui émanaient de toi. Et puis…je t’ai vu souffrir aussi, t’appliquant à devenir si froide et distante, chaque jour un peu plus. Alors que je connaissais toute la fragilité de ton cœur de femme…
Et je t’ai défié, je t’ai provoqué pour te faire comprendre que tu n’étais pas de glace, je t’ai fait souffrir jusqu’à en être cruel. Parce que c’était mon seul recours…Comme ce jour où j’ai utilisé cette petite domestique pour te montrer la puissance de ces désirs charnels que tu méprisais…
Car je savais que tu étais là, dans l’ombre. A nous observer.
Et que tu pleurais sans doute…mais je t’aimais, si fort que je n’avais cure de me conduire comme un misérable. Mais c’est pourtant ce que je suis. Un homme fou d’amour, mais fou tout de même.
J’étais venu te le dire ce soir, parce que je n’en pouvais plus de taire ce sentiment qui m’étouffait...
Et mes démons m’ont rattrapés sans que je puisse rien faire…je suis éperdument épris de toi, jusqu’à…te faire cette chose ignoble… »


Il ploya la tête d’accablement.
Sans un mot Oscar se redressa tout à fait.
De très longues secondes elle resta assise, le ciel de ses yeux voilés par l’orage qui montait.
Puis, sans le quitter un seul instant elle se saisit de son soulier à boucle et l’enleva, laissa tomber l’autre pareillement au sol. Elle souleva légèrement ses hanches et fit glisser le pantalon, le dégagea de ses jambes avec les bas blancs à leur suite. Se mit debout enfin, délesta ses épaules du tissu déchiré et jeta ce bout de tissu à terre presque rageusement. Confondu, André recula de quelques pas.

- « Quoi mais…qu…qu’est-ce que tu fais… »


Le jeune homme contemplait cette splendide et insolente nudité sans pouvoir bouger, statufié par l’éclat d’audace traversant les claires prunelles. Nimbé par la sourde lumière des bougies et du feu dansant la peau d’albâtre se réchauffait d’ambre, les courbes tendres des seins paraissaient animées d’une vie propre grâce à un souffle de plus en plus oppressé. Elle était sublime ainsi, sa chevelure de lionne courant sur ses épaules nues. Et terrible. Sans la moindre hésitation elle vint à lui, si déterminée et affolante de brusque sensualité que le jeune homme en fut cloué sur place.
Oscar planta ses yeux redoutablement déterminés dans celui de cet homme immobile. Une seconde elle écouta sa propre respiration, et ne put maîtriser le léger tremblement de sa voix.

- « Depuis que nous sommes enfants on nous a appris à suivre les règles, à nous conformer aux rôles que l’on a choisi pour nous. Toujours nous avons été dociles. Je me croyais homme, je me croyais fort et invincible, et toi le seul ami qui puisse comprendre ce que je ressentais. Qui savait qu’au fond de moi je n’étais pas si puissante que cela. Que malgré tout je restais…une femme. Mais je me suis battue pour me persuader du contraire, très tôt j’ai muselé tous les élans de mon cœur et…ignorés ceux de mon corps. Comme on me l’a appris…»

Elle s’approcha un peu plus, davantage, jusqu’à pouvoir capter pleinement la stupéfaction éblouie vibrant dans cet œil unique.
- « Et toi…toi André tu m’as montré cette merveilleuse faiblesse, que je sentais en moi lorsque je te regardais...
Oui tu m’as fait mal, à me tenter de cette façon, à me faire découvrir toute cette réalité physique que je n’ai jamais souhaité. Mais…tu as brûlé mon armure aussi, tu as révélé en moi un tourment que j’aime, qui m’embrouille l’esprit et me rend folle moi aussi ! Alors ça m’est égal tu entends, que les moyens dont tu t’es servi soient misérables. Je te veux André. Je te veux contre ma peau, je veux que tu me caresses, que tu me touches.
Je veux connaître ce plaisir et je me moque du reste ! Je te veux toi, comme tu es, avec tes souffrances et tes démons, ta folie comme tu l’as nomme, je veux tout cela. Je…je veux te faire l’amour, éperdument, je veux ton parfum d’homme contre ma bouche, et surtout découvrir tous les secrets de ton corps, tous ! »


En un éclair elle supprima le peu d’espace qui existait et fondit sur les seuls trophées qu’elle revendiquait désormais : ses lèvres.
Elle l’embrassa éperdument avec dans la main ce membre qu’elle perçut dans toute sa gloire à travers le tissu.
Elle but le gémissement du jeune homme quand sans plus pouvoir s’arrêter elle pétri tendrement le symbole même de ses convoitises, cette verge qu’elle désirait si fortement découvrir. Elle se serra, fébrile, ivre de voir son rêve le plus ardent se réaliser : être nue contre ce corps habillé et percevoir le contour des muscles durs sans les voir encore, avec sur elle plus aucun rempart pour pleinement profiter de ces sensations dévorantes.
Surpris par cet assaut André fut contraint de reculer, mais accueillit la langue avide d’Oscar avec toute la fougue de ses besoins d’homme amoureux. Elle s’accrocha à lui, le griffa peut-être tant le besoin de se nourrir de sa bouche galvanisait toutes ses audaces, son autre main frottant la chaleur insoutenable du pantalon. Un autre gémissement d’André entre ses lèvres, de pur contentement, de manière brusque il se saisit de sa taille pour la plaquer contre lui, pour que ce soit ces reins de femme qui viennent étreindre cette fois la brûlure de son bas-ventre.
- « Oh oui ! »

Elle fut contrainte d’échapper à ce baiser pour exprimer sa joie, parce que c’était plus merveilleux que tout de sentir cette chair ardente lovée entre ses jambes. Lui, son corps, sa force, tout André dans ce contact !
C’était inconfortable et follement excitant, sans plus pouvoir se contenir elle pressa plus fort ses hanches, écarta les pans de sa veste pour la lui retirer fébrilement. Ils butèrent contre le mur, elle se coula encore plus étroitement prise d’un tel besoin de possession que déjà son ventre se révulsait.
Elle jeta le vêtement et voulut poursuivre contre la chemise mais il la prit dans ses bras, et il n’était pas doux non, c’était un étau vivant et terriblement puissant qui l’enserrait, à l’image de sa propre bouche martyrisant celle du jeune homme. Tellement bon pourtant…Car cette douleur était la même qui celle de leurs corps, celle enfouie durant tant d’années de solitude meurtrie.
Il la tenait si fort et elle avait tant de joie à sentir sa poitrine s’écraser contre la dureté de son torse deviné, avec contre ses lèvres cet incessant combat. Tout aussi violent que ce premier baiser volé, qu’elle lui rendait avec la même sauvagerie. Elle planta durement ses mains dans ses épaules autant pour le souder à sa nudité que se soutenir elle-même tant ses sensations l’étourdissaient, plus encore lorsqu’il embrassa son cou à perdre haleine, presque à la mordre.

- « Oscar tu me rends fou ! Je devrais être doux avec toi et…je…je ne peux pas ! Je t’aime tellement ! »

Elle renversa son visage pour mieux le voir.
- « Je n’ai pas besoin de douceur, je n’en veux pas. Je veux ta folie, ton amour, aime-moi André ! Donne-moi ce plaisir que je demande ! »

Elle agrippa cette chevelure de nuit, la serra désespérément quand elle fut soulevée jusqu’au lit et tomba, sur ce corps masculin. Tout ce qu’elle voulait, tout ce qu’elle désirait était là, contre sa bouche et ses seins, son ventre. Lui, et ce caractère tourmenté et tendre qu’il transmettait à chaque étreinte, tel qu’il était. Tout ce qu’elle aimait. Sans ménagement elle se saisit du large col blanc et tira, lacéra d’un geste ce rempart. Ses yeux brillant comme des escarboucles cherchèrent la prunelle émeraude, lui sourirent avec un rien d’espièglerie.

- « A présent nous sommes quittes ! »


Elle enfoui son visage contre la peau hâlé, sur ce flanc gauche complètement mis à jour et soumis à ses envies, gémit son immense satisfaction de pouvoir y laisser la brûler de ses baisers. Enfin ! Cette peau surprise à l’aube dans la splendeur de son effort, ce charme sensuel magnifié par des gouttes d’eau, cette rude douceur…Oscar l’embrassa à pleine bouche, se perdit sur les côtes puis les muscles saillants du ventre, là et partout à la fois ; avec rage et ferveur, qui l’étonnaient elle-même. Ce ventre tout aussi incandescent que le sien sous l’exquise violence qu’elle imposait, dont la puissance musculaire se tendait sous ses lèvres.
Sa convoitise s’échoua soudain contre la ceinture, cette impudente…Elle protesta d’impatience et de délice.

- « Ooh si tu savais…comme je me suis sentie coupable d’éprouver tout cela pour toi… »


Ses mains fébriles vinrent en renfort, ouvrirent, arrachèrent, dévoilèrent avec la plus parfaite jouissance toute protection autour des hanches du jeune homme, ce dernier l’y aidant d’un dernier coup de rein.
Enfin…
Ce sexe masculin, symbole de leur amitié défunte et de leur secret amour qui impudique clamait ce désir qu’il avait d’elle…Oscar suspendit son geste, avec juste son souffle haletant près de ce membre érigé, et ses yeux trop brillant contemplant cette partie de lui qui l’avait choquée, révoltée, puis bouleversée et troublée…

Son cœur battait sourd dans ses temps et la jeune femme lâcha ce qu’elle tenait, délaissa le vêtement à mi-cuisse. André non plus ne bougeait, fixa le clair visage où se jouait d’innombrables désirs.
Elle le regarda.
Dieu qu’il était beau…de ce captivant mélange dû à la sombre lumière de sa chevelure, cette fière animalité que dégageait sa carrure virile ; et la douceur de son visage, cet amour qu’il lui hurlait de façon muette. Le cœur renversé Oscar reporta ses yeux sur la verge dressée si belle dans son indécence. Elle perdait pied, tremblait, joyeuse et ivre, les larmes aux yeux.

- « Je l’ai détesté, ton corps...J’ai cru le haïr, et pourtant je ne pouvais en détacher mes yeux lorsque tu le caressais. Je voyais ton visage et ton sourire…et je rêvais de te faire ces choses, toutes ces choses défendues…apprends-moi…montre-moi comment te faire l’amour André, guide-moi… »


Un lourd gémissement en réponse, une plainte très profonde tendit le corps masculin.
Parce que sans plus pouvoir attendre elle avait posé ses lèvres à même ce sexe brûlant de sang, en un baiser de dévotion et de respect, de dévorante découverte…
- « …dis-moi ce que je dois faire… »
…si tendre, si aimant qu’André se cambra plus intensément sous l’autre baiser qu’elle donna, sans savoir, entrecoupé de ses murmures balbutiés. Elle questionnait, mais ses baisers se multipliaient sur cette dureté incroyable de douceur, couvrirent la peau si fine d’éphémères contacts appelant des gémissements plus puissants.
- « Dis-moi André… »

Elle n’entendit pas ce dernier long, très long gémissement lorsqu’elle posa délicatement sa bouche sur la pointe perlée de désir. Comme la chose la plus essentielle du monde elle embrassa ce gland rosé, le cœur battant à tout rompre sous l’incroyable plaisir que lui donnait ce baiser sulfureux ; aucune crainte, aucun trouble ne l’inhibait désormais, sa bouche trouvait seule la douceur que réclamait cette extrémité si sensible. Elle l’embrassa, encore, pour ne plus pouvoir la quitter, resta soudée à cette chair gorgée de vie.
Elle entrouvrit les lèvres et laissa filtrer ces quelques larmes salées contre sa langue, par de toutes petites pressions, timides au début puis plus hardies, goûtant pleinement cette partie de lui si intensément savoureuse…
Elle aurait poursuivi mais ses épaules furent saisies, se retrouva sans transition basculée sur le dos. Avec un merveilleux spectacle dans son champ de vision immédiat : le sourire d’André.

Il l’embrassa rudement et elle adora lui transmettre ce goût de péché dont elle venait de se délecter. Ce baiser avait un parfum de stupre et de souffre, de sexe, d’amour…Elle attrapa ce dos massif pour le coller à son corps, débarrassa comme elle put le jeune homme de sa chemise en haletant sa prière.

- « Aime-moi André…je n’en peux plus d’attendre ! »


Mais ce séduisant démon ne l’entendait pas ainsi apparemment, une main venue brusquement sur son intimité le lui prouva. Oscar émit sa surprise puis écrasa sa violente délectation sur la vaste épaule de sentir enfin la pulpe de ces doigts faire leur chemin, se glisser par de très affolants petits mouvements au centre de sa toison pour y ouvrir les fragiles parois. Elle s’accrocha comme une noyée sous l’exquise sensation d’un doigt plus sûr que tout les autres se glisser en elle, au point que des larmes jaillirent à la commissure de ses longs cils. Oscar enfonça ses ongles et laissa monter son cri, de joie mais de frustration aussi sous ce léger va-et-vient qui ne lui suffisait plus.

- « Prends-moi ! Je t’en prie… »


Plus de mesure ni contrôle, juste la joie sauvage de percevoir le poids de cet homme sur elle, et la vigueur qui s’échoua subitement tout au creux de ses jambes. La stupéfaction lui fit ouvrir grand les yeux quand ce membre gonflé effleura le cœur épanoui de sa virginité, se fit de plus en plus présent, excitant chaque fibre.
Mais soudain Oscar se rejeta en arrière, très violemment, désorientée, voulut repousser le jeune homme sans compromis possible.
Il était en elle.
Ce membre viril l’avait envahit, complètement, affamé et fulgurant de douleur. Elle se cabra, dévastée par l’angoisse et la peur face à ce qui n’était plus délice mais souffrance. Dans un brouillard elle perçut un mouvement de retrait, extrêmement désagréable, puis un coup de rein impressionnant de domination et de possessivité jugea-t-elle. Plus que son corps ce fut son âme qui rejeta ce terrible asservissement.

- « Non ! Non…arrête André ! J’ai mal, arrête, laisse-moi !»

Elle crispa ses mains, le griffa sans le vouloir jusqu’au sang.
- « Arrête ! Ne fais pas ça, je…ce…a…arrête… je…arrête… »

André ne s’était pas arrêté.
Patiemment, tendrement, ses reins avaient amorcé un mouvement quasi imperceptible et fluide, très lent, en une invisible pulsation organique…lancinante. La stupeur reconquis l’azur sous ce bercement intime. Une chaleur, très lointaine…un bien-être né de cet épouvantable inconfort…épouvantable ? Oh non…Elle balbutia, osant à peine respirer.

- « Que…oh mon dieu…qu’est-ce qui…se passe, c’est…ooooh…. »


Ses paupières s’alourdirent, son corps se faisait souple sous le regard attentif d’André qui souriait comme jamais…Elle avala fébrilement sa salive pour tenter de reprendre sa respiration mais une légère onde traversa sa colonne vertébrale, comme la surface d’une eau endormie s’éveillant sous la caresse du vent.
- « Ooooh …André… »

Ce prénom semblait le sésame de tout cela…elle le redit, confondue de s’entendre moduler ces deux simples syllabes d’une infinité de gémissements, à mesure que la douleur s’assoupissait sous une vague de feu. Ces fesses sublimes, qui palpitaient entre ses jambes…Maladroite elle tâtonna pour reprendre possession des larges épaules décidément propices au réconfort, avec sous sa paume le roulement doux et lancinant de leurs muscles…Et les subtiles rotations de cet homme au creux de son ventre, ce membre incroyablement chaud, apaisant…du moins le crut-elle. Car une brusque décharge de plaisir la détrompa, d’un habile coup de rein le jeune homme envahit un peu plus l’antre humide de son intimité et la douceur disparut, remplacé par des pulsions étranges beaucoup plus impressionnantes de satisfaction.

Des plaintes venues elle ne savait d’où franchir ses lèvres, uniquement motivées par ces incessants mouvements qu’elle se surpris à vouloir plus vifs…Une puissance… était en train de naître dans son corps et c’était terrible à percevoir parce qu’elle ne contrôlait plus rien, déstabilisant et surtout formidable de s’en laisser conquérir. Elle s’arqua de jouissance.
- « Oh mon Dieu, oui…plus vite…Oh An…André, si tu savais comme c’est bon ! »

Oui il le savait…parce qu’il y avait la même flamme sur ces traits virils, en une communion identique. Cette évidence la traversa alors qu’un remous plus fort tendit ses reins : elle aussi pouvait donner cette même jouissance qu’elle recevait de lui…à cet homme aimé, blessé d’amour, fou d’elle…Elle se cambra, volontairement, s’enferra plus voluptueusement sur la raideur délicieuse. La sensation fut fulgurante.

- « Ooooh oui André…viens encore, plus profond, oui !! »

Devait-elle dire ces choses ? Etait-ce indécent, obscène ? Au diable, elle s’en moquait !
Face à la découverte de ce partage quasi mystique de leurs corps plus rien ne comptait. Elle quittait la réalité…à mesure que ces propres ondulations embrasèrent ces envies et qu’André y répondit d’une vigueur incomparable. Non, plus de douceur ni mesure, jamais…Encouragé par ses cris André ne se gêna bientôt plus d’envoyer la ferveur de cet amour dévorant à chacun de ses assauts, son bas-ventre pris d’un appétit frénétique. Pour la plus grande joie d’Oscar qui lacéra son dos de ses ongles, d’extase cette fois, sous ce plaisir purement sexuel détruisant l’amitié pour faire naître l’amour.
La verge gonflée d’ivresses s’enfouit encore et elle exprima sans réserve sa félicité tant ces pulsions qui ravageaient son intimité ne semblaient avoir de fin. Ce mâle visage vint tout contre son cou pour la mordre tendrement, il se saisit de ses cuisses pour les ouvrir et leurs faire accueillir l’amplitude de petits mouvements latéraux positivement affolants ; il laissa battre sa verge de longues secondes avant de reprendre les merveilleux coups de boutoir, puissants…

Un cri plus haut que tous les autres et Oscar se laissa anéantir, vaincue. Une boule de pure énergie explosa dans son corps, féroce, abrupte et presque bestiale, à laquelle fit rapidement écho la sourde vocalise d’André. Elle perçut un doux liquide se répandre en elle mais continua de gémir son plaisir malgré le poids qui s’appesantit brutalement, au contraire incroyablement heureuse d’accueillir son amant au creux de ses bras.
Oscar n’arrivait à reprendre son souffle mais le tint serré, savoura encore les contractions de son intimité autour de ce membre assouvi comme un besoin perpétuel de plénitude.
Enfin…

Il l’avait faite jouir, elle avait connu ce bonheur d’être une femme…Pas qu’il lui ait pris sa virginité, non.
Mais de l’avoir menée à l’extase, dès la première fois. Elle l’aurait bien gardé encore mais il s’échappa, se laissa retomber lourdement à ses côtés. Elle entendit son souffle haletant, comme le sien, ses soupirs sous les innombrables vagues de délice qui les atteignaient toujours.
Oscar ne bougea plus, se contenta de respirer, de vivre, d’exister durant quelques secondes. Sans plus penser.
Juste ce simple bonheur d’être extraordinairement vivante pour la première fois de son existence. Touchant son ventre sous l’émerveillement si vivace de l’avoir eu là, au-delà de ses fantasmes et de ses rêves.
Un frôlement contre ses doigts et elle tourna la tête pour le regarder lui prendre la main, sans bouger, en cette même position qu’elle avait. Serein. Apaisé. Amoureux…
Oscar sentit son sein se gonfler de reconnaissance, c’était assez irrationnel mais une sorte d’euphorie courait le long de ses veines, comme si l’explosion jouissive avait épanoui quelque chose en elle, à jamais.
Elle…fleurissait, par chaque pore de sa peau, chaque muscle touché d’une sorte de grâce. Jusque dans son esprit où se distillait une gaîté que jamais elle n’avait connu. Et pourtant ses larmes coulaient parce que cet acte sanctifiait la fin d’une vie malgré tout, la sienne, celle du froid Colonel de Jarjayes.
André lui prit la main et fit la seule chose qui pouvait calmer cette blessure invisible : il éclata de rire, doucement …
Un rire voilé de jouissance, sourd, rendu pénible par l’intensité qu’ils venaient de partager. Mais l’incarnation d’une joie parfaite, pleine.
Lui, qui ne riait jamais…
Elle vint au-dessus de ce petit miracle, coula sa nudité contre le flanc vibrant des derniers soubresauts de voluptés et fit une chose que depuis longtemps elle aurait du faire. Du bout des doigts elle écarta la mèche sombre, révéla le sacrifice auquel il avait consenti. Et embrassa cette paupière lacérée par la cicatrice…sans un mot, parce que c’était inutile.
Cette caresse en disait plus long que tout sur ce lien qui les avait toujours unis trop solidement pour ne pas les faire souffrir, malgré eux. Mais qu’ils avaient réussi à dénouer pour le rendre bien plus fort qu’Oscar ne le supposait encore.

 
 
* * *
 
 
 
 
 
Un rêve, la réalité…une angoisse avant toute chose.
Ce dernier sentiment était trop profondément ancré en lui pour qu’il puisse l’oublier si aisément.
André ressentait toujours ce pincement bien particulier lorsqu’il se réveillait, au moment précis où son oeil valide s’ouvrait sur l’âpreté de sa condition et ce rôle d’ombre servile, qui ne lui convenait plus depuis de trop longues années.
Il parvenait presque à en goûter l’amertume dans sa bouche. Et aujourd’hui...aujourd’hui son coeur se serra, oui, mais par habitude, l’espace d’un soupir.
Tout s’évanouit pour faire chanter la plus infime parcelle de son corps, quand explosa dans son cerveau le souvenir, la certitude que tout était vrai.
Comme le lui prouva ce poids, léger, abandonné contre lui.
Les cheveux fous sur lesquels dansaient la lumière jeune de l’aube, cette chevelure éparse sur son torse et son abdomen qui l’habillait complètement d’or liquide. Et invisible, nichée sous ce buisson ardent, la douceur d’une joue contre sa peau nue. Aussi légèrement que possible il dégagea les mèches, patient, avant d’espérer découvrir une vision qu’il avait cru à jamais impossible : elle...
Complètement alanguie, perdue dans ses rêves, épuisée et souriante à travers son inconscience, splendide dans son sommeil parce que toute aussi nue que lui. Quand il effleura son visage un soupir lui répondit, suivi d’un souple mouvement qui fit se détendre ce corps de nacre vers l’oreiller posé là au hasard.
Ce lit ressemblait décidément à un champ de bataille. Quel merveilleux combat que leur nuit...si terrible aussi.
Né d’une folie sans nom, d’un acte désespéré au point d’avoir cru y brûler son âme. Un frisson le parcourut, il se mit en appui sur un coude aux côtés de cet ange si intensément charnel et contempla le front lisse.
Elle s’était offerte en pâture à son appétit de fauve et c’est lui qui avait été dévoré, complètement. Sa colère...oui, il était devenu comme fou malgré la force qui lui hurlait de cesser, cette fois il avait été trop faible pour l’écouter. Trop amoureux, trop malheureux au point d’étouffer. Au point de vouloir se tuer lorsqu’il serait sorti de cette pièce, pour avoir cru la briser, elle, sous la frénésie de son amour sans espoir. D’avoir profané ce corps tant désiré, de l’avoir enseveli du sien, de manière interdite...
Puis ses regards, ses paroles qu’elle lui avait offertes pour l’attirer parmi ses sombres désirs jusqu’à lui révéler sa blessure, enfin : elle l’aimait. Lui, le frère que le destin lui avait imposé. Devenu l’amant qu’elle avait choisi.
Et lui pauvre fou n’avait rien vu du sentiment immense qui l’animait. Comment imaginer cela...Cet amour qui pareillement leur tenaillait les entrailles au point d’en étouffer de passion, à s’en blesser.
Si fortement...
Il étendit sa main, caressa le front blanc, sans le toucher. Les doigts à quelques millimètres non pour sentir son grain de peau mais l’espèce d’aura qui s’en dégageait, cette chaleur qui la caractérisait. Oscar, ardente et belle, un soleil d’orage qui lui brûlait le corps. Une nature unique, avec sans cesse le besoin de vivre pour elle, de manière exclusive, de tout lui donner, toujours. Sa vie, son âme, toutes ses forces, il voulait tout pour elle même s’il n’était rien en ce bas monde. Juste un homme, avec un amour trop grand pour lui sans doute. Cette nuit, oh cette nuit...
Il suivit le contour de la joue, les lèvres trop rouges pour ne pas révéler leurs incessants baisers, la ligne pure de la gorge. Cette nuit incomparable où elle s’était donnée parmi les draps froissés et leurs mots brisés d’émotion. Et Dieu...aurait-il seulement supposé...La vue du jeune homme s’égara vers le sol, sur le couvre-lit de soie où s’épanouissait en son centre la fleur écarlate de leur amour...
Il avait été le premier.
Il l’avait possédée comme aucun autre homme avant lui.
Oscar...sa femme, pour cette nuit. Avant que l’obscurité ne tombe sur son regard et ne l’enveloppe définitivement elle lui offrait ce cadeau ; il voyait, encore, pour peu de temps sans doute et elle l’avait accueilli en elle.
Avec amour, et fougue, presque impitoyable. Ainsi qu’elle l’avait décidé.
Car il avait eu cet éblouissement de découvrir enfin une autre Oscar, celle que depuis longtemps il pressentait sous la froide carapace du Colonel de Jarjayes ; physique, sensuelle, qui aimait le plaisir avec passion.
Et l’avoir vue naître aux délicieuses voluptés du corps, qu’elle aimât cela de tant d’impétuosité surtout le ravissait…
La main d’André descendit sur la peau douce de son épaule où couraient les mèches folles, ne les écarta pas pour ne pas la réveiller. Dormait-elle encore, d’ailleurs...Il sourit : sans en avoir l’air elle avait quantité de ruses à son arsenal de séduction. Comme de se laisser admirer par ce frôlement sachant très bien le pouvoir qu’elle possédait désormais dans l’abandon de sa nudité.
Il l’avait constaté cette nuit quand sans l’ombre d’un doute elle s’était dressée face à lui, étourdissante d’audace en s’offrant à ses regards. André sentit son ventre bouillonner à l’évocation de cette déesse païenne revêtue de sa seule blondeur.
Il continua sa course lente et dessina le galbe du sein blanc, s’attarda sur le mamelon rosé, s’arrêta. Sans le toucher jamais. Juste pour en éprouver la chaleur, légèrement plus intense, à moins que ce ne fut son propre sang qui lui donnait cette illusion. Il suivit la respiration égale, profonde. Descendit, remonta brièvement avant de recommencer, l’émeraude de sa prunelle dévorant la poitrine haut placée et ronde, qui effrontément clamait la féminité évidente de cet étrange soldat. Le soleil jouait sur la peau d’ivoire, par intermittence, les volets fermés diffusaient suffisamment de lumière pour qu’il distingue clairement le grain si fin et presque bleuté.
Puis il s’arrêta.
Il suspendit ses doigts et ne bougea plus du tout, pour que la pointe douce vienne buter légèrement à chaque inspiration, puis peu à peu se durcir sous la caresse légère. Un peu plus, délicieux que de voir ce téton rosir si intensément lorsqu’il se dressait ; André mordit son sourire sous la subtile tentation d’y goûter…
Il regarda le visage endormi, les cheveux de lionne aux quelques mèches collés à ses tempes qui soudainement la rendait juvénile, comme lorsqu’elle était adolescente après un rude combat à l’épée, qu’elle venait de le battre et le regardait du haut de son triomphe sans méchanceté aucune. Flamboyante. Comme à cette instant, avec ce soleil de blondeur rayonnant tout autour d’elle froissé désormais par la sueur de leurs étreintes amoureuses.
Il tenta d’échapper à l’envoûtante sensation d’embrasser sa peau, continua son méandre le long du ventre, du nombril. Contre la courbure de la hanche, harmonieuse quoique disciplinée par la vie militaire, lisse et finement musclée. Là aussi il y percevait une chaleur incomparable, ce frémissement vital présent sous la pulpe de ses doigts.
Le coeur d’André s’anima un peu plus quand sa main légère effleura la brume dorée de ce sexe de femme, dessina de l’index le pli secret. Comme sous l’impulsion d’un mouvement involontaire dû au sommeil il l’entendit gémir et la cuisse bougea, s’ouvrit légèrement. Evidemment…Bien sûr que non, elle ne dormait pas...
Le sourire du jeune homme s’accentua, de même que l’excitation de ses sens.
Elle paraissait assoupie cet ange faussement innocent, et lui commençait à sentir ses ardeurs bien éveillées en voyant le ventre blanc se contracter d’imperceptibles soubresauts sous ses attouchements délicats. Et ce geste qu’elle venait d’avoir, qui l’invitait à poursuivre.
Il se pencha. Pour simplement laisser l’empreinte tiède de sa respiration sur son ventre, s’amusa de ce jeu sensuel auquel elle l’invitait ; se séduire, se chercher, se tenter encore ils en étaient là, toujours. Comme une sorte de lutte engagée contre le destin pour arracher ces instants de bonheur auxquels jamais ils n’avaient eu droit.
Du bout des doigts il frôla la toison pubienne, affolant un peu plus les nerfs courant sous la peau d’albâtre. Il voyait le ventre se creuser puis se bloquer, à peine, et c’était splendide à voir parmi cette lumière juvénile, ces petites gouttes de soleil qui pleuvaient sur son corps quand elle frémissait ainsi.
Le volet était criblé d’éclats liquides et toute la clarté atténuée de l’aube venait paresseusement mourir sur eux. Et le silence, ce silence à peine dérangé par leurs respirations amoureuses avec juste quelques chants d’oiseaux encore engourdis.
André aurait voulu capturer cet instant suspendu car il était concret soudain, empli du parfum d’Oscar ; de cette envie qui montait d’elle auquelle répondait la sienne, ce parfum d’amour qui le rendait fou.
Il le respira avidement jusqu’à presque toucher cette claire intimité mais s’écarta aussitôt, pour ne pas réveiller sa fausse endormie.
Il se grisa sous l’odeur sauvage et subtile, bien avant de fendre ce fruit défendu de toute la délicatesse du monde. Son doigt entrouvrit la chair fragile, s’y glissa tendrement et cette fois ses yeux se fermèrent, de délice, rien que d’imaginer la sensation qu’elle pouvait en éprouver. Il prit son temps pour en trouver le point le plus sensible, caressa longuement les plis intimes d’invisibles mouvements pour les éprouver de douceur, exciter enfin cette petite boule de chair si câline de pressions légères, et lentes, puis l’étourdir de subtiles arabesques sans plus s’arrêter…
Un cri, très bref.
A peine plus haut qu’un murmure.
Il tourna la tête et découvrit une brûlure plus intense que le soleil lui-même : son sourire. Si resplendissant qu’il réalisa ce qui venait d’arriver ; elle venait de jouir, là, parmi la lumière feutrée de cette journée naissante, de manière très douce.
Les yeux toujours obstinément clos…
Il remonta vers son visage, attiré par l’extase qui s’y jouait puis déposa un baiser tout au creux de la paume ouverte reposant sur l’oreiller. Elle secoua lentement la tête.
- « Je ne savais pas...j’ignorais cela André…personne ne m’avait dit que de tels plaisirs existaient… »
Le Colonel était si difficile à extraire de sa mémoire. L’homme qu’elle avait été. Insensible...distant...André sourit à ce tableau, rien qu’en appréciant les courbes voluptueuses frémissantes de contentement. Elle s’étira telle une jeune chatte et soupira d’aise de se retrouver soudain entre ses bras.
- « Mmmmh, est-ce possible...Il me semble bien que je pourrais mourir à présent, sans le moindre regret. Avec la certitude d’avoir vécu tout ce que je devais. Je suis heureuse André...vraiment heureuse, tu comprends ? »
Il embrassa ses longs cils, reçut le reste de ses confidences contre sa joue.
- « Cette nuit...notre nuit, j’ai eu le sentiment que...on mon dieu c’était si fort. J’étais...complète. Oui, c’est ça, je me suis sentie entière, pour la seule fois de ma vie. Lorsque tu étais en moi...c’était tellement intense, si bon…mais je ne devrais pas parler de ces choses n’est-ce pas, la morale ne le permets pas sans d... »
André la fit taire d’un baiser. La morale...il était bien temps de s’en souvenir. Il embrassa son murmure de protestation quand elle fit mine de le repousser, la serra un peu plus durement pour le seul plaisir de faire cambrer son corps.
- « André ! Tu...tu m’étouffes, arrête ! »
Jamais il ne pourrait se lasser de cette douce musique qui éclatait en cascades, qui roulait telles de petites perles de joie aux quatre coins de la pièce. Son rire, sa récompense. La preuve qu’elle l’aimait, lui, sans que personne ne puisse plus franchir la citadelle de son coeur. Il ne la lâcha pas jusqu’à ce qu’elle se calme. Il la regarda se laisser aller contre lui, abandonnée comme jamais. Volontairement sans défense. Comme lorsqu’ils étaient enfants, du temps de leur amitié indéfectible. Du temps où elle se confiait à lui, les soirs d’orage pour faire mine d’être brave. Avec cette assurance que cela durerait toujours, qu’ils seraient frères quoiqu’il arrive pour affronter ceux qui oseraient en douter. Et aujourd’hui elle était dans ses bras, femme, et plus que tout acceptant de l’être enfin ; l’acceptant pleinement, prête à le vivre totalement.
Il embrassa son rire et elle se tut.
Insidieusement la joie fut bousculée par le désir au rythme de ses effleurements, il excita les lèvres ourlées par l’épice de ses baisers mais elle était trop fatiguée ce matin pour reprendre le combat effréné de la nuit : elle se laissa séduire par la bouche avide, l’entrouvrit sans plus bouger afin qu’il vienne savourer son souffle. Il le dévora, repoussant sa langue pour mieux venir la déguster. Jusqu’à ce qu’elle exhale sa béatitude.
- « Aime-moi encore André... »
- « Non Oscar, il est temps...Je dois partir. »
- « Non… »
- « Il le faut mon amour. Même si je préfèrerais rester éternellement ici personne ne doit me voir sortir de tes appartements. »
Elle secoua la tête, souriante.
- « ...tout m’est égal... »
- « Ne parle pas ainsi. Je...j’ai été suffisamment fou, à présent c’est terminé. Je dois être raisonnable, prudent. Je ne dois pas te compromettre. Tu comprends ?»
N’ouvrirait-elle donc jamais les yeux ? Et ne cesserait-elle d’être aussi intensément désirable, avec ses petits seins ronds qui sous lui quémandaient autre chose que de la prudence et de la raison. Elle continua, cette ravissante tête de mule.
- « Mmmh je t’en prie André, fais-moi l’amour… »
- « Pas question. »
- « J’ai envie de toi…et toi aussi… »
- « Je…n…
- « Encore, André... comme cette nuit…encore…»
Pas ce mot. Pas maintenant. Son ventre se renversa à l’idée de séparer leurs peaux brûlantes, et pour combien de temps ? Quelques heures, toute une journée, feindre d’être indifférent pour mieux taire son désir, mais bon dieu la voilà la vraie souffrance ! S’arracher d’elle, résister à ses suppliques, ses sourires, les plaisirs qu’offrait son corps. Bon dieu ! Encore...Trouver, trouver quelque chose à dire, à ne pas faire surtout.
- « Tu n...tu n’as pas faim ? »
- « Mmmh ? Si, un peu...énormément. »
- « Alors habille-toi, Grand-Mère est sans doute déjà à pied d’oeuvre aux cuisines. »
- « Non...il est trop tôt... »
- « Mais si voyons. Il...il est tard et... »
- « Embrasse-moi. »
La tentation à l’état pur. Et lui, la stupidité incarnée. Parce qu’il obéit…à sa conscience.
Il résista à cet appel délicieux et se dégagea vers la chaleur hélas bien trop tiède qui régnait hors du lit. Bon sang elle était extraordinaire dans ce fouillis de draps de dentelle et de couvertures mises sans dessus dessous, ses courbes laiteuses paraissaient jaillir telle la proue d’un navire fendant l’écume. Il détourna les yeux.
Mon dieu, il avait décidément trop bien réussi...
Lui montrer la puissance des sens sur la raison, lui faire comprendre l’éveil naturel du plaisir que l’on éprouve à être aimée, caressée...Mais à présent...c’était lui qui devenait l’esclave, et elle sa geôlière. Etre auprès d’elle, lui faire découvrir bien d’autres voluptés durant ces instants d’éternelle paresse, lui donner encore et toujours ce qu’elle réclamait…
- « Allons Oscar, sois raisonnable je t’en prie. Lève-toi. »
- « Raisonnable ? Je l’ai toujours été je crois… et je n’en ai plus envie...Mmmh cette nuit...c’était tellement merveilleux...Je crois qu’il n’y a rien haut dessus de cela. J’aime ton corps André, il me rend folle, j’ai envie de toi...Viens. »
Il fronça les sourcils. Il avait créé un monstre...
Ramassant son pantalon il s’amusa à cette pensée, très agréable pour sa mâle vanité après tout.
- « …attends André...ne vas pas trop vite... »
Il jeta un regard vers le lit, sans comprendre.
Et bien...Elle avait finalement ouvert les yeux, avait basculé sur le ventre pour le lorgner sans vergogne. Il soupira, fataliste.
- « Tu devrais déjà commencer par t’abstenir de me regarder de cette façon. Si quelqu’un te vois détailler mes fesses de la sorte aujourd’hui, ta réputation va devenir désastreuse. »
- « Oui mais pour le moment elles sont nues, et elles me plaisent énormément ainsi...André, j’ai très envie d’une chose, soudain. »
Allons bon. Il s’attendit au pire...
- « Oscar, si c’est pour me demander de revenir dans ce lit la réponse est non, définitivement. »
- « Oh, cruel...mais non, ce n’est pas ça. J’ai envie d’autre chose. »
- « C’est loin de me rassurer. »
- « Tu n’es qu’un insolent et je te le ferai payer en temps voulu. Mais pour l’heure...je voudrais me rafraîchir avant ce repas que tu m’as promis. »
- « Je n’ai rien promis du tout, je te demandais just... »
Le reste mourut sur ses lèvres quand le mot « rafraîchir » et toutes ses conséquences franchirent la barrière de sa compréhension.
- « Tu veux...Un bain, c’est ça ? »
- « Oui et non… »
- « Pardon ? »
- « Je crois me souvenir qu’à cette heure-ci un très bel homme aime prendre ses aises dans la grange… »
- « Quoi... »
- « Un homme fort peu vêtu... et qui a grand besoin qu’on l’aide à sa toilette…tu ne crois pas ? »
I
l prit un air stupéfait, alors que ses reins lui envoyèrent une très agréable pulsion. Jamais il n’aurait pensé qu’elle le désirât à ce point. Et curieusement il en fut quelque peu déstabilisé : elle conservait cette manière si personnelle de mener les situations et les personnes, cette autorité naturelle qui en imposait à plus d’un.
Mais dans le domaine particulier de l’amour...il aurait cru que les rôles s’inverseraient. Qu’il conserverait, lui, le privilège de mener les jeux de séduction grâce à l’inexpérience de cette femme-soldat. Et c’était exactement le contraire qui se passait.
Et tandis qu’elle riait de le voir si surpris, qu’elle s’étirait en des gestes lascifs et merveilleusement tentateurs, son cœur se serra.
Il parlait raison, prudence, comme si ils avaient l’avenir devant eux.
Alors qu’il l’avait toujours su, bien avant de prendre son corps, que cet amour était d’avance condamné.
La cécité, pour lui.
La faiblesse, l’horrible sensation de devenir un poids mort pour celle qu’il aimait à se damner. Cette femme, qui jamais ne tuerait complètement l’âme du soldat vivant en elle, il le savait bien. Il ne le lui demandait pas d’ailleurs parce que c’était ainsi qu’il l’aimait, exactement telle qu’à cette seconde. Conquérante, sûre d’elle, ayant faim de sensations, qu’elles soient charnelles ou amoureuses. Alors que lui restait-il à lui, qui n’était rien, qui il y avait peu encore n’était qu’une ombre échappée de leur enfance ? L’évidence de la réponse le traversa de part en part.
Vivre cette passion.
Telle qu’il l’avait construite, avec folie et amour.
Vivre à en mourir, à en hurler de rage et de joie comme une course vers l’impossible.
Se donner à elle, la prendre comme elle le voudrait et peu importe la prudence. Raisonnable...à quoi bon. Tout roturier qu’il était, misérable, sans fortune ni titre il affronterait son destin, le bourreau peut-être, et la prison sûrement pour avoir aimé au-dessus de sa condition.
Avoir corrompu la réputation du pur Colonel de Jarjayes…
Mais il mourrait heureux, comme un homme anonyme, debout. Avec dans le corps le souvenir de ce matin, de cette lumière chaude habillant ces seins nus d’indécence.
La respiration légèrement heurtée par un désir dévorant il enfila sa chemise sans la quitter du regard, satisfait de voir la même fièvre gagner ce ciel azur.
Il sourit, provocateur.
- « Très bien, si c’est ce que tu veux...En tout cas mes ablutions matinales ont l’air d’avoir grand effet sur toi à ce que je vois...Je me savais irrésistible mais à ce point… »
- « Non mais quel prétentieux ! Tu es bouffi d’orgueil ma parole. »
- « L’orgueil...un grave péché…»
- « Celui auquel je pense est encore plus impardonnable, tu sais.»
- « Lequel ? »
- « Je te laisse deviner. En attendant dépêche-toi : tu avais raison, j’ai faim... »
Il adora cet appétit.
Il descendit rapidement et procéda comme quelques semaines plus tôt, à l’identique. Avec des images scandaleusement réalistes flottant tout autour de lui. Où tout cela les mènerait-ils ? Il devait bien admettre que la peur d’être découverts agissait comme un stimulant supplémentaire à ses désirs. Il avait envie d’Oscar, à en avoir mal.
Tu es ma source mon amour, je m’abreuve à toi tant que mon oeil me permettra de te contempler. Je suis fou. Je t’aime. A un tel point, au-delà des mots, de la morale, de Dieu même ; tu vois, au point de blasphémer...
De ne penser qu’à toi…
Il redécouvrit cette grange, les rais de lumière qui zébraient le toit inégal en faisant danser la poussière fine, le piaffement des chevaux. Il était heureux. Parce qu’elle allait venir.
Il prit son temps pour s’installer, versa l’eau chaude dans le baquet de métal et se déshabilla.
Et plus que tout autre bonheur tu me désires, moi. M’aimes-tu ? Oui bien sûr, tu me l’as dit cette nuit…une fois. Une seule et unique fois…Oh ma chère et tendre Oscar, je te connais si bien, mieux que toi-même.
Je connais ton cœur et je sais qu’il ne comprend pas encore cet élan qui nous pousse l’un vers l’autre. Ce que je t’ai fait découvrir t’étourdit, te grise, ton corps ne se lasse pas de mes caresses.
Et je vais continuer à te montrer combien le plaisir peut être pur malgré son souffre. Mais l’amour...je crois que tu ne sais pas encore maîtriser ce sentiment. Tu souhaites la volupté et je te la donnerai, oh oui par Dieu je te le jure. Tu t’éveilles à des choses qu’hier tu reniais et tu as tant de fougue !
Si tu savais comme tu es belle lorsque tu cries mon nom…Oui je vais te donner ce frisson charnel que tu aimes tant…mais je perds la tête désormais, je suis éperdument épris de toi et je dois me contenter de ces rendez-vous clandestins, de ces plaisirs volés à l’insu de tous !
Que vas-tu décider Oscar, quel avenir choisiras-tu pour nous ? Je dois te laisser ce choix, ne rien t’imposer…être patient comme je l’ai toujours été.
Mais j’ai tant de mal à dissimuler cette ivresse qui nous gagne lorsque nous nous regardons.
Il s’étrilla vigoureusement les bras et les épaules, humecta son visage et sa chevelure ébène en souriant sous la morsure légèrement acérée de l’air sur sa peau. Incroyable comme il se sentait important, comme chaque sensation démultipliait son bien-être. Il suspendit son geste : la porte se refermait, doucement, et aujourd’hui il avait ce droit, unique, de ne plus feindre de croire qu’elle n’était pas là. Il se retourna, avec superbe, si fier de toujours la faire rougir grâce à sa nudité.
Elle s’arrêta à quelques mètres, la voix sourde.
- « Cette image m’a obsédée, si longtemps...Je n’en dormais plus certaines nuits, je...Je te voyais, sans cesse. Et tu es là…encore plus attirant que dans mes rêves... »
Elle avisa le broc d’eau chaude et le pain de savon.
Son cœur gagna plusieurs battements, rien qu’à voir les mains fines s’enduire de mousse avant de s’approcher de lui. Il bascula légèrement son visage en arrière pour la regarder et savourer ce contact contre sa poitrine, ses mains qu’elle posa bien à plat. Un élan emporta brusquement ses certitudes : bon dieu mais que lui importait sa vue bientôt défunte, quel importance cela pouvait revêtir quand de pareilles sensations lui traversaient le corps.
Il n’avait qu’à le fermer déjà cet oeil, à jamais, pour qu’explosent aussitôt ses autres sens décuplés par les pulsions primitives qui montaient en lui. Tant que ses mains seraient sur lui, sur son ventre et sa taille, qu’elles prendraient ce soin particulier à venir vers ses hanches et s’y attarder, si tendres, pour finir leur course douce bien trop bas…
Il crispa ses mâchoires et sourit, l’esprit trouble, essaya de museler ses gémissements afin de profiter de cette insolente toilette qui convergeait entre ses jambes.
- « C’est bien ainsi que tu t’y prends habituellement n’est-ce pas… »
André savoura l’éclat malicieux et tentateur qui illuminait ses magnifiques yeux bleus, de même que ce lent savonnage en forme de va-et-vient…
- « Oui, c’est exactement comme cela… Mais fais attention Oscar…après ce sera ton tour… »
- « …j’y compte bien. Tourne-toi... »
Ignorant combien de temps encore il parviendrait à se contenir pour la prendre contre lui André, tenta de contrôler sa respiration pour continuer d’apprécier chacun de ses touchers qui étaient autant de caresses, se laissa savonner le dos par les coulées de lave qu’étaient devenues ces paumes longues et fines.
- « Depuis ce fameux matin je t’ai tant désiré...oh, si tu savais toutes les folles idées qui sont nées en moi, que j’osais à peine imaginer... »
Il la désirait incroyablement, laissait monter cette vague de sensualité qui se transformerait bientôt en véritable torrent, dévastateur. Il perdait toute raison.
Elle versa l’eau tiède contre sa peau, longuement, suivit chaque goutte du bout de ses doigts ; s’égara contre ses reins, descendit encore puis écarta la courbe ferme de ses fesses et vint en caresser l’intimité, à la limite du supportable.
- « Lorsque tu étais là, cette nuit…cela m’a fait mal tu sais... »
Mon Dieu...malgré l’extase qui vrillait son corps il ploya la tête. Cette blessure, il la garderait à jamais en lui. Celle forgée par le dur métal de sa honte, de sa culpabilité. Sa faute. Qu’il devait affronter envers et contre tout.
- « Oui je sais…Et je crois que jamais je ne pourrai vraiment me pardonner de ce que je t’ai fait…»
- « Non André ! »
Elle appuya sa joue contre son dos mouillé.
- « Ne dis pas ça, ne dis plus jamais ça ! Parce que ce qui s’est passé je l’ai voulu. Je l’ai tellement désiré…c’est ce que je voulais te dire…ce que je tenais à te redire. Cette douleur, je l’ai adoré…C’était...sublime, André. Je te le jure, j’avais peur et je me sentais mourir de plaisir...j’avais mal, oui...et j’en voulais encore…Je t’ai provoqué en disant que j’appréciais Girodelle alors que c’était faux…Parce que j’étais jalouse, que j’avais devant mes yeux le souvenir de cette jeune garce jouissant sous tes mains. Alors tes démons…je les connais et je les aime, parce que ce sont les miens aussi…»
André se retourna, d’un coup, l’agrippa au hasard pour chercher ses lèvres. Ses premiers mots d’amour…
Il mouilla sa bouche, il l’enlaça sans précaution pressé de la faire jouir encore, comme jamais, éternellement dévoué à ce feu dévorant qui les minait de désirs. Il mit ses lèvres au supplice, pour la faire protester d’impatience elle aussi, son sexe douloureux contre le tissu de son vêtement et perdant la tête de la sentir s’accrocher à lui, se fondre et s’incruster, à lui faire mal. Sans savoir il la souleva, vers le foin qui deviendrait sans cesse une couche de fortune pour cacher leur passion, à défaut d’autre chose, et tant pis si c’était misérable de se cacher ainsi. De s’aimer en clandestins.
C’était s’aimer, déjà, et cela resterait magnifique.
Ils tombaient dans ce gouffre choisi par eux, le jeune homme se jetant sur elle pour la débarrasser de ses affreux vêtements de garçon, pour que vive encore ce corps de femme dans tout l’éclat de sa splendeur charnelle...
Tout à leur passion dévorante ils mirent du temps pour entendre les cris venant de ce monde qu’ils étaient désormais si pressés de quitter, à tout moment. Ce monde réel. Froid, rationnel. Leur vie.
Au loin, la voix de Grand-Mère lançait son courroux de ne pas trouver son petit-fils...
Un cri de rage le déchira.
Cela serait donc toujours comme ça, à présent.
Ils restèrent immobiles, le coeur glacé de devoir s’arracher de cette étreinte avortée. Trop ou pas assez, voilà ce que seraient leurs regards. Leurs étreintes. Ce fut André qui eut ce courage, encore une fois.
Il se détacha du ciel troublé d’envies, parvint à un semblant de sourire.
- « Je…Je dois y aller semble t-il. Ou bien Grand-Mère aura des soupçons sur mes mœurs en voyant que ce bain s’éternise plus que de raison… »
Elle ne réagit pas, allongée dans ce foin et désirable au possible elle le regardait et se perdait toujours en lui, et le jeune homme ne sentit que plus sûrement la douleur d’être…raisonnable.
Ce mot lui arracha les tripes.
Il se détourna, brusque, ramassa ses vêtements et se rajusta en se forçant à ne plus la voir.
- « Tiens, prends ma chemise. Grand-Mère va encore râler sur mon manque d’éducation en me voyant revenir torse nu mais tu ne peux pas prendre le risque qu’on te surprenne comme ça. »
Il s’enfuit littéralement pour échapper à la tentation de cette poitrine révélée par sa fougueuse et humide étreinte.
Se taire.
Ne pas céder à la tentation de hurler son amour à la première personne croisée. Ne pas céder. Garder cette phrase, ce précepte lacérant son cerveau jusqu’à l’inscrire en lettres de feu, pour ne jamais faillir.
Jusqu’à en devenir une litanie presque vide de sens. Comment faire, comment ne pas la désirer, à chaque minute ! Il n’était qu’un homme, faillible. Fou d’amour.
Ne pas céder.
Près de dix minutes plus tard, après s’être changé et avoir subi les premières semonces de la journée de son aïeule, il s’attabla avec cette seule idée en tête. Ne pas la trahir. La protéger, comme il l’avait toujours fait. Mais…
Il crispa le poing quand d’un mouvement léger elle s’installa, juste en face. Raisonnable…impossible. Il ne pourrait pas.
Ne le voulait pas et c’était ce qui le désespérait le plus mais qu’importe. L’aimer. Tout le reste ne comptait plus.
Il leva les yeux.
Elle aussi s’était changée, elle portait une de ses tenues habituelles. Une tenue d’homme. Assortie d’une longue robe de chambre masculine bleu nuit contrastant avec l’azur si tendre de ses prunelles. Un ciel où il rencontra ce même désespoir, l’exacte urgence qu’il ressentait. Et autour d’eux les bruits insoutenables et familiers constituant une injure à la passion exceptionnelle qui bouillonnait tout au fond de leur âme, en permanence.
Leurs regards plantés l’un en l’autre clamaient l’immensité de cet amour interdit, ce besoin sexuel sans partage que leur défendait leur condition. Il aperçut ses larmes, de frustration et de peine.
- « Vous avez faim, au moins ? J’espère bien, j’en ai fait pour un régiment ! Ça vous calmera, parce que pour vous dire la vérité j’en ai plus qu’assez de vos incessantes chamailleries ! A la longue vous me donnez mal à la tête tous les deux, à vous disputer comme vous le faites. Ces derniers jours je n’en p … »
Oscar se leva précipitamment, renversa son siège au passage. Pour masquer son désarroi, parce que là encore elle devait mentir, continuer l’imposture de son existence quand son corps avait faim d’amour et non plus de nourritures terrestres. Eperdu André se retourna vers Grand-Mère, le cœur saignant de ne pouvoir courir à sa suite…et reçu une taloche vengeresse.
- « Vaurien, misérable !! Je me doutais bien que vous vous seriez déjà disputés ! Que lui as-tu fait hein ? Que lui as-tu dit pour la mettre dans des états pareils ! Tout est de ta faute André, tout ! J’en ai assez de toi, cette situation devient impossible ! Maintenant tu vas lui préparer son petit déjeuner et aller t’excuser ! Tout de suite ! Mais je te jure que ça ne va pas en rester là : vous allez me faire mourir de chagrin tout les deux ! »
 
* * *
 
 
Oscar massa ses tempes affaiblies par le manque de sommeil. Elle avait trouvé refuge dans l’un des salons de travail du rez-de-chaussée, délaissant volontairement ses appartements. Elle s’accouda au bureau puis, décidément trop fatiguée, se laissa choir contre le dossier de son siège.
Que faire…Mais pourquoi cette question me taraude t-elle sans cesse, quels que soient mes choix ! Pourquoi toujours décider, de tout. Pourquoi n’ai-je jamais droit à me laisser aller à cette douceur, cette innocence d’esprit, m’en remettre aux évènement…Me laisser porter, être légère…
Ne plus sentir ce poids qui pèsent tant sur mes épaules. Je ne sais plus où j’en suis à vrai dire, désormais je n’ai plus qu’une idée à peu près claire je crois : me perdre dans tes bras…
Mon Dieu, nous sommes définitivement devenus fous. Je le suis, moi, et j’adore cela si tu savais ! Je ne me reconnais plus, tant de passion…me surprend je l’avoue.
Je ne savais pas. Je ne connaissais pas l’amour, tel que tu me l’as fait découvrir…mais…est-ce que je t’aime après tout, véritablement ?
André, André peut-être suis-je une impie de penser de la sorte mais j’en viens à me demander si ce que je ressens est réellement de l’amour ! Je me sens si…désemparée, une telle puissance, presque une destruction de toute raison qui me fait peur. Avec Fersen c’était si différent…oh jamais je n’aurais cru pouvoir repenser à cela, mais…pour Fersen jamais je n’ai rien éprouvé de comparable.
Je me souviens…je me souviens de sa voix, de son sourire…mon cœur battait à tout rompre lorsque je le regardais. Mais toi André, c’est mon corps que tu fais battre aujourd’hui, avec une telle intensité…je…cela m’emporte.
En dépit de tout.
J’aime tes baisers, tes caresses, ta force. J’ai besoin de toi. Mais pour autant, est-ce que je t’aime ?
Pourquoi me poserais-je la question, si c’était le cas ? Ne devrais-je pas être heureuse, simplement heureuse sans plus chercher de réponses au malaise que je sens en moi…Comme…comme un menace qui planerait sans cesse au-dessus de nous.
Hier je te haïssais. Je le croyais, avec violence…et à présent tes mains sur moi je ne peux plus m’en passer, j’en ai un besoin vital, telle la folie qui nous a prise tout à l’heure. J’ai mal de me contenir, si tu savais !
Je dois t’aimer alors, car sinon je ne ressentirais pas ce déchirement, horrible, quand je ne te sens plus près de moi…mais je veux plus, et je ne sais pas ce que c’est.
Faudrait-il que…que je parle à mon père…lui dire…ce que je ressens pour toi ? Tout cela me fait peur.
Je n’ai plus de courage, soudain. Je voudrais m’endormir, à côté de toi, et ne plus penser…
Me laisser aller, ne plus rien devoir décider, juste te sentir me faire l’amour et rien d’autre.
Je défie Dieu, je défie mon père, et pourquoi ? Pour quelques instants de plaisir et…non ! Ce n’est pas cela.
Cette force qui m’emporte quand je sens tes lèvres…je…je les voudrais toujours sur ma bouche…Et pourtant je ne sais pas si je t’aime, André. Je ne te le dirais peut-être jamais. Si tu ne m’avais pas fait découvrir l’homme que tu étais…jamais je n’aurais levé les yeux vers toi...Cela me tourmente…peut-être un jour aurais-je compris ton amour, mais d’une autre manière, ou jamais…Comment savoir !
Ma jalousie existait bel et bien pourtant, alors pourquoi cette incertitude ! J’aime ce que tu provoques dans chaque partie intime de mon corps, je te veux, à tout moment.
Et je ne sais plus que décider…


Oscar se redressa, prit une plume pour tenter d’échapper à la langueur qui l’envahissait, tenta d’écrire quelques lignes. Elle se sentait perdue mais heureuse, indéniablement. Néanmoins elle s’était enfuie à l’instant et cela prouvait que quelque chose n’était pas à sa place dans le secret de ses pensées.
Le bruit de la porte la fit sursauter, mais un profond soupir de soulagement accueillit la cause de tous ses délicieux tourments.
Quelle chose étrange…dès que ses yeux le contemplaient tous ses maux s’envolaient.
Sitôt qu’il eut franchi le seuil et refermé la porte, André s’empressa de poser sur le bureau le plateau chargé des douceurs préparées par Grand-Mère, et sans attendre contourna la table pour tomber à ses genoux.
Il lui prit les mains et les embrassa douloureusement.

- « Oscar…tu souffres et je ne peux rien faire, je ne suis d’aucune aide…Je ne peux que me taire pour ne pas te trahir, et cela me semble si dérisoire… »


Elle prit son visage et le força à la regarder. Glissa de sa chaise pour se mettre à genoux elle aussi, le serrer contre elle. Elle le pressa si fort au point d’en perdre le souffle. La même envie, les mêmes tourments…il éprouvait en tout point ce qu’elle ressentait, le désordre des sentiments le blessait tout comme elle.
- « Qu’allons-nous faire André, dis-le moi ! »

Ils s’embrassèrent, en une étreinte qui n’avait rien de tendre. Puis elle cacha son visage dans la chaleur de son cou, le respira, laissa errer ses lèvres sur sa joue puis contre le lobe de son oreille.
- « J’ai envie de toi, si tu savais. A chaque instant. Suis-je anormale André ? Sommes-nous des monstres pour nous désirer autant ? »

Il ne répondit pas. A quoi bon ? Cela n’était plus nécessaire désormais. Leurs souffles parlaient pour eux, leurs corps tendus à se rompre. Elle finit par se rasseoir, il l’y aida mais resta à ses pieds, la tête posée sur ses genoux. Oscar essuya nerveusement une larme d’un revers de main avant de la plonger dans la chevelure ébène. Il fallait réfléchir. Elle se devait de prendre des décisions. Agir. Mais pourquoi cette faiblesse, toujours, lorsqu’il était là ? Sa chaleur. Ses mains…oh pourquoi n’arrivait-elle plus à penser normalement…

- « Moi aussi je me la pose cette question Oscar : sommes-nous condamnables d’avoir fait l’amour ? En cela je suis le seul fautif : je t’ai tenté, je t’ai séduite. J’ai employé tous les moyens en mon pouvoir pour te montrer à quel point je t’aimais. Et je ne regrette rien…même si j’ai peur qu’un jour tu ne m’en veuilles…»
- « T’en vouloir…mais il ne s’agit même plus de cela André ! Ce qui me torture n’est pas d’avoir fait l’amour avec toi, c’est de l’avoir voulu si fortement ! De le désirer, encore, dès l’instant où je te regarde ! Mon éducation m’a appris à croire que ce que j’ai fait avec toi est un péché mortel, le pire de tous. Mais je ne peux m’en convaincre. Je n’y arrive pas, au point qu’il m’est devenu complètement égal de brûler dans toutes les flammes de l’Enfer du moment que c’est avec toi… »

Il releva brusquement la tête.
L’émeraude exprimant si fort ce même besoin charnel, cette flamme qu’elle se plaisait à attiser en sa présence.
Elle étouffa un sanglot lorsqu’il embrassa passionnément ses cuisses, ses mains soudain autour de sa taille comme en vénération. Elle s’offrit, malgré elle, avec une joie quasi sauvage pour l’accueillir plus étroitement, creusa ses reins et écarta les jambes alors que des larmes affamées perlaient à ses yeux en voyant sa frénésie à le voir chercher le centre même de sa jouissance. A vouloir la même chose qu’elle. Il repoussa la robe de chambre, balbutiait des phrases incohérentes d’adoration, de joie maladroite, enfoui son visage au creux de sa taille. Elle se dressa violemment quand il posa sa bouche sur son sexe, même si l’intensité ne réussit pas à l’arracher de la réalité.
- « Non André ! Pas ici ! »

Elle le repoussa, avec la même hargne qu’elle avait de vouloir faire l’amour, ici justement.
A en devenir folle. Il fallait lutter contre cela, ce n’était pas humain de ressentir de telles choses !
Elle se détourna et échoua son accablement sur le bureau, s’accouda en se prenant la tête entre les mains. Elle était si fatiguée. Si intensément, si délicieusement fatiguée…se laisser aller à cette langueur…et pourtant une telle énergie coulait dans ses veines, un désir immense qui palpitait dans la moindre fibre de son être. Elle sentit qu’il appuyait doucement son front contre son bras.
- « Pardonne-moi. Moi aussi je te désire avec une telle intensité que j’en oublie tout. »
Ils restèrent ainsi de longues minutes, tremblants, sans oser parler.
Puis il se releva, remarqua son abattement.
- « Et toi qui n’as encore rien mangé… »
- « Je ne peux rien avaler. »
- « Ce n’est pas ce que tu disais tout à l’heure. »
- « Je…André je suis perdue, jamais j… »
- « Tais-toi. Pour une fois dans ta vie, laisse-moi m’occuper de toi, vraiment. Oublie tout, même si cela n’arrange rien, juste pour quelques heures ou quelques jours, nous verrons bien. Ne pense pas aux conséquences même si c’est la pire folie imaginable. Et pour commencer mange un peu. »

Il lui tendait une tasse de chocolat avec son irrésistible sourire par-dessus, et c’est à lui qu’elle rendit les armes. Elle trempa ses lèvres, puis but avec reconnaissance parce qu’elle avait faim, énormément en effet malgré les troubles de son âme.
Rassérénée mais guère apaisée elle posa la fine porcelaine, soupira de lassitude.
Ce qui fut loin de satisfaire le jeune homme. Il revint à la charge.
- « Mange, je t’en prie. »
- « Non…Laisse-moi. »
- « Attention ne m’oblige pas à te torturer ! »


Il était penché sur elle, à demi assis, Oscar le regarda pensivement. Etait-ce cela, l’amour ? Cette légère ivresse qui renversait soudain le cours des choses rien qu’à le regarder sourire ? Admirer cette tendresse qui émanait de lui sans pouvoir clairement la définir ? Sentir son corps frémir à la plus anodine de ses paroles, imaginer les pires délices quand il la regardait de cette façon…
- « Me…torturer…Voilà qui commence à…m’intéresser… »
Entendre sa voix s’altérer, se changer en murmure presque rauque au fond de sa gorge, c’était cela aimer ?
Entendre sa respiration lui faire défaut, et cette chaleur intolérable grandir très doucement au creux d’elle-même. Ne plus écouter la voix de la sagesse, laisser grandir à nouveau la flamme secrète de ses désirs et murmurer, au lieu de se taire :
- « …et comment comptes-tu t’y prendre ? »
Il s’activa brièvement vers le plateau.
- « Comme ceci. »

Mon Dieu…Sans pourvoir esquisser le moindre mouvement Oscar reçut contre sa bouche deux lèvres légèrement enduites d’une fine pellicule de miel, qui se firent un devoir de lui en faire pleinement goûter la saveur.
Pour Oscar l’amour eut désormais un goût sucré. Doux.
Quoique un peu collant.
Non…Fondant.
Elle mit plusieurs secondes à rouvrir les yeux après qu’il se fut détaché d’elle.
Et recommença à respirer, tant bien que mal.
- « C’est… »
Voilà, comment était-ce ? Excellente question. Totalement…indéfinissable.
- « Encore… »

Le seul mot intelligible qu’elle puisse dire alors que sa raison lui criait au contraire d’arrêter tout cela, qu’il cesse de la…torturer. Il avait utilisé ce mot…elle ne savait plus. Son cerveau était définitivement hors de fonction. Un océan de sensations à la place, et elle ne songeait qu’à y plonger corps et âme…encore, toujours plus…Il reprit un peu de miel et resta parfaitement passif, il se pencha mais la laissa venir à lui ; et c’était encore plus érotique. Innocent. Par le simple fait de capter sa lèvre inférieure, doucement, sans aller vite, de laisser la chair moelleuse s’insérer entre les siennes et l’aspirer, lécher la moindre particule de suavité liquide pour finalement la transformer en baiser. Ils ne souriaient plus. Attentifs à ce feu dévastateur qui mordait le ventre, chaque muscle. Le regard voilé Oscar remonta le long de la silhouette qui tout comme elle respirait profondément, lourdement.
Elle passa sa langue sur ses lèvres.
- « On devrait me brûler pour ressentir ce que je ressens…Mais tous les sermons n’y pourraient rien : j’ai faim de toi, et je ne peux lutter… »

Elle se leva, déjà au-delà de la réalité, hypnotisée par cette bouche luisante de promesses. Elle se détourna une brève seconde pour à son tour cueillir de le pointe de son doigt un peu de liquide ambré et en laquer ces lèvres viriles si tentatrices. Elle prit sa bouche comme la plus exquise des gourmandises et mis sa langue tout contre la sienne en murmurant son délice, ce privilège qu’il lui accordait pour elle seule. Si délectable, au point de ne plus vouloir s’arrêter jamais. Elle plongea encore son doigt, à tâtons, pour ne pas délaisser un seul instant pareille saveur, l’immergea totalement. André ferma les yeux quand elle lui offrit complètement son index, il en suça la chair puissamment avant de reprendre sa bouche de manière toute aussi urgente, presque brutale. Cela devait être cela, l’amour…
Oscar se martelait que c’était folie, impensable, indécent en ces lieux où à tout moment on pouvait les surprendre. Mais cela n’avait plus aucune espèce d’importance. Elle quittait presque son corps, son esprit se brouillait.
Elle se faisait instinct.
Et pour elle cela restait beau ; prendre ce qu’André lui donnait, y répondre, franchir les limites. S’aimer, au-delà du raisonnable.
Elle se pressa contre lui.
- « On ne devrait pas, n’est-ce pas…faire ça…ici…André ? »
- « N…non. »


Il prit une rasade de miel contre la pulpe de ses deux doigts, et elle crut qu’il devenait fou quand il lui macula non pas ses lèvres mais son menton… jusqu’à ce que sa bouche se referme sur la tendre courbe, léchant les gouttes qu’il avait égarées là…exprès. Elle sentit un regain de vigueur la lacérer, ses yeux frémirent de le sentir aspirer la commissure de ses lèvres puis descendre encore, sur sa gorge.
- « An…André, pas ici…»
Ça, c’était sa raison qui venait de supplier, tout au contraire elle se ploya vers lui quand d’un coup sec il écarta le col de sa chemise pour déposer un peu de nectar sur sa peau nue, sur un des grains de beauté qu’elle avait là. Elle défaillait de se sentir déguster de cette manière, laissant échapper des paroles de plus en plus inintelligibles.
- « Non An…dré…Si quelqu’un entrait…je…nous ne…oooooooh ! »

Il dut la ceinturer au creux des reins pour qu’elle ne tombe, quand son sein brusquement dénudé reçut la caresse liquide du miel. Il noya l’auréole rosée sous cette substance merveilleusement collante et y plaqua sa bouche, Oscar très vite abandonnée de toutes forces à chaque succion, incapable de plus se tenir debout. Sans jamais lâcher ce téton durement dressé il l’aida à se rasseoir, à se laisser tomber plutôt, tous deux complètement déchaînés de passion. Elle se renversa au fond de sa chaise.
- « Aime-moi André, maintenant...ici ! »
Toujours sur elle, partout, l’embrassant, la goûtant, il batailla avec les cordons de sa robe de chambre, puis les attaches de son pantalon d’homme, l’ouvrit.
Sans plus clairement savoir ce qu’elle faisait Oscar prit un peu de nectar ambré pour l’égarer sur son propre ventre, protesta de jouissance quand il dévora sans attendre la chair blanche, jusqu’à la mordiller, ses mains sur elle et son pantalon pour atteindre ses cuisses moites de désir…
Déjà ils se laissaient glisser au sol quand un brouhaha dans les couloirs les prévint d’un danger effroyable.

Pire que tout ce qu’ils avaient imaginés jusque là.

Le désespoir les cloua touts les deux, exsangues, pris dans les filets de cette étreinte de nouveau avortée. Mais le danger imminent fut à la hauteur du total affolement qui les gagna.
Eperdue Oscar prit soudain conscience de la situation et du désordre effroyable de sa mise, celle d’André qui ne valait guère mieux. Tant bien que mal elle referma précipitamment sa robe de chambre sur sa chemise ouverte et son pantalon déjà à demi baissé. Des monstres oui, des impies qui ne respectaient rien ! Et ils allaient chèrement le payer…car des éclats de voix furieuses s’élevaient au loin, de plus en plus précises.
Une épouvante.
Le Général de Jarjayes en personne approchait, accompagné des glapissements de Grand-Mère.

Honte…
Oscar crut être revenue quelques semaines en arrière lors du sermon de l’évêque de R., et cette fois le Jugement de Dieu allait bel et bien s’abattre sur eux par la bouche de l’intransigeant militaire qui jamais n’admettait de réplique. Comment avait-il su…car il savait tout, à n’en pas douter ! Vu la fureur qui fondait sur eux cela ne pouvait en être autrement. Avaient-ils crié, à l’instant, sans s’en rendre compte, éblouis par leur folie délicieuse ? Mais oui évidemment, ils perdaient la tête…et ils avaient gémi sans doute, toute la maisonnée devait être au courant à présent ! Excommuniés…André chassé sur l’heure…et elle, déshéritée…Oscar eut la flamboyance du désastre imminent.
Se taire.
Mentir.
Le sauver, coûte que coûte.
Elle jeta un regard de noyé au jeune homme.

- « Oh bon sang, nous sommes perdus, redresse-toi André, fait semblant d’être calme ! »
- « Foutre dieu Oscar, je ne peux pas ! »


Avec effroi Oscar découvrit alors la formidable érection qui déformait l’entrejambe du jeune homme, et à moins d’être un superbe idiot il ne faudrait pas plus d’une demi seconde à son père pour comprendre ce qui venait de se passer. Et le Général son père était très loin d’être idiot.
Le cœur de la jeune femme menaça de s’arrêter de battre.

- « Je…je…bon sang cache-toi ! Immédiatement ! »
- « Comme un vulgaire voleur ? Jamais je… »
- « Je sais c’est horrible mais nous n’avons pas le choix, je t’en prie ! »
- « Cela sera donc toujours comme ça désormais ! Et ce désir, tu crois qu’il est si facile à maîtriser ? »
- « Oui ! Non…je …je ne sais pas mais ce n’est pas le moment de philosopher ! Cache-toi bon sang ou je te tue ! »
- « Grand Dieu mais j’ai envie de toi Oscar ! »
- « Tais-toi ! »


De grands coups rageurs tambourinèrent soudain contre la porte.
- « Mon fils, vous êtes là ? »
- « Ou…oui Père ! En…Entrez, je vous en prie ! »


Un courant glacial traversa la pièce.
Un regard.
Plus dense que l’azur du blond militaire mais avec ce même éclat indompté.
L’orgueil des Jarjayes.
Une poigne extrêmement ferme referma la porte, et une silhouette qui ne l’était pas moins avança résolument vers le bureau.
Le Général de Jarjayes venait de l’ancien monde.
Celui pétri de valeurs et d’honneur moral, de probité, de noblesse bâtie sur le seul mérite parfois de compromis mais jamais de lâcheté. Sa propre personne importait peu, seul son titre avait quelque valeur et chèrement défendu, par le sang, afin de toujours marcher comme il le faisait à cet instant. Tête haute, le regard droit.
Le Général n’avait pas le genou courtisan, il ne se ployait devant quiconque. La sévérité qu’il imposait à chacun il se l’imposait avant tout à lui-même, et entendait à ne jamais être repris sur ses paroles. Le contrer, c’était injurier sa caste. Lui tenir tête, une insulte faite à la mémoire de ses ancêtres.
Sec, aride en apparence, portant perruque comme se doit tout aristocrate qui se respecte, il n’admettait aucun laisser-aller dans sa maison, tant moral que physique d’ailleurs, et c’est un œil déjà fortement réprobateur qui glissa sur la robe de chambre maladroitement serrée, avant d’englober le reste de la pièce. Vide.
La voix fut à l’image du froid regard.

- « Fort bien mon fils, vous êtes seul. Grand-Mère m’affirmait à l’instant qu’André était ici mais elle se trompait apparemment. Cela me convient car des échos fort déplaisants me sont parvenus, dont je voudrais vous entretenir sur l’heure. »
- « Mm…mais avec joie, Père. Vous savez que je suis heureuse hum...heureux de nos conversations, trop rares je le déplore. »
- « Oui, certes. »
- « Prenez place, je vous en prie. »
- « Non je préfère rester debout pour cette conversation qui n’a rien d’agréable ! »


L’esprit confus, respirant par intermittence, Oscar vit avec un rien de soulagement son père s’éloigner vers les portes-fenêtres pour y puiser un peu de réflexion, la mine profondément contrariée en effet.
Elle en profita pour jeter un coup d’œil aussi furieux que désespéré à André, tapi de façon malcommode…sous son bureau.
Par bonheur ce meuble faisait partie d’une collection intéressante ramenée de Saxe, où la partie externe se composait d’un panneau de bois plein et orné de marqueteries, occultant complètement le jeune homme.
Avalant sa salive avec beaucoup de difficulté Oscar lui envoya un discret coup de genou pour qu’il se tienne tranquille. Repousser surtout ses mains qui s’obstinaient à venir se poser sur le velours entortillant ses jambes, pour très légèrement continuer à les caresser…Mais comment pouvait-il penser à cela en un moment pareil ! Il est vrai que dans l’état d’excitation où ils se trouvaient…Elle-même avait du mal à s’en remettre.
Elle lui lança un regard assassin qui en disait long. Puis reporta tant bien que mal son attention sur son père : le désastre était déjà largement consommé elle jugea inutile d’éluder l’épouvantable orage qui se préparait. Elle attaqua résolument.

- « Et bien Père, de quoi souhaitez-vous me parler ? Et pardonnez-moi pour ma tenue mais j’avoue que ce matin je me sens…quelque peu…fatigué. »
Une caresse plus accentuée sous la table faillit la faire sursauter.
Le traître…Elle se concentra sur ce visage sévère qui se tournait vers le sien.

- « Laissons cela, à condition que cela ne se reproduise plus. Je n’aime pas ces nouvelles mœurs qui consistent à ce que les domestiques puissent voir leurs maîtres en tenues négligées. C’est parait-il la dernière mode mais cela donne lieu à des racontars que je trouve grotesque et malséants. Sur ce, venons-en au fait : je suis au courant de ce qui se passe entre vous et André, mon fils ! Et j’en suis extrêmement mécontent figurez-vous ! »

Oscar se sentit pâlir mais serra les mâchoires pour se donner du courage. Il savait…
Un léger bruit mat prouva d’ailleurs qu’André venait à son tour de sursauter d’effroi en se cognant la tête ou dieu sais quoi d’autre, le forçant à suspendre tout geste de ses mains ; ce qui était déjà appréciable pour sa concentration.

- « Ce…ce qui se passe… ? Je ne vois pas ce que vous voulez dire… »
- « Ne me prenez pas pour un imbécile je vous prie ! »


Elle n’osait plus respirer, et son palais fut décidé lui aussi à ne plus assumer ses fonctions.
Oscar regarda l’uniforme galonné revenir vers elle, comme prêt à la déchiqueter.
- « Croyez-vous que j’allais tolérer pareil comportement ? C’est une honte mon fils, vous devriez avoir honte d’agir comme vous l’avez fait ! C’est à vous de donner l’exemple infaillible de notre nom, en toute circonstances, et vous voir vous comporter comme…comme…un chiffonnier me remplit du plus suprême mépris ! »
Oscar sentit son sang se mettre résolument à bouillir. Même si le terme « chiffonnier » la déstabilisa il agit aussitôt sur son orgueil comme un aiguillon. Cela se passait invariablement comme cela à vrai dire, entre elle et ce père qu’elle adorait défier. L’azur se chargea à son tour de sombres nuages.

- « De mépris ? Mon Père vous me connaissez suffisamment pour savoir que jamais je ne recule face à mes responsabilités ! Et que je n’ai pas pour habitude de me laisser lancer des accusations sans explications valables ! »
- « Ne me parlez pas sur ce ton ! »
- « Alors parlez clairement ! »

Ils s’affrontaient, ouvertement. Intentionnellement. Comme une forme étrange, curieuse, extraordinairement alambiquée de fierté réciproque. Si semblable l’un et l’autre, entiers et acérés sans jamais vouloir se montrer tendres. En perpétuel rapport de force pour se montrer à la hauteur des espérances qu’ils se forgeaient eux-mêmes. Malgré l’effrayante situation dans laquelle elle se trouvait Oscar retrouva les automatismes, ne pouvant décemment se lever elle se redressa néanmoins de toute sa hauteur sur son siège. Bien que son malaise emprisonnait toujours son cœur. Et les mains d’André ses genoux.

- « Et que voulez-vous dire par chiffonnier ! Utilisez les termes qui vous chantent mais certainement pas celui-là ! Au risque de vous choquer davantage je ne tolèrerai pas ce mot, jamais, pour qualifier ce qui vient d’arriver effectivement entre André et moi ! Et de cela je n’aurais jamais honte ! Pas une seconde ! Je suis fière au contraire de ce que j’ai fait avec André, au-delà même de ce que vous pouvez imaginer !»


Estomaquée par sa propre audace mais réalisant trop tard que ses sentiments l’avaient pour une fois menée là ou elle voulait, elle eut du mal à rester impassible lorsque la bouche du jeune homme étreignit passionnément ses jambes pour les embrasser de reconnaissance. Même de manière incomplète, elle venait enfin de s’engager sur ce chemin que toujours on lui avait refusé : celui de la vérité.
André venait de le comprendre et éperdu se pressait contre elle, la couvrait de baisers silencieux. Elle avait pris sa défense…C’était certes émouvant mais Oscar perçu davantage l’effet troublant que cela avait, les sourdes pulsions de tout à l’heure revenaient en force, ce qui n’était d’ailleurs pas bien difficile puisqu’elles n’étaient jamais parties ; terriblement mal à l’aise sous ce feu qui s’emparait de son corps elle fit un mouvement du genou pour qu’il cesse.
Peine perdue.
Lui aussi devait sentir quelques pulsions car il redoubla d’ardeur. En un geste désespéré elle passa une main sous la table pour au moins lui tirer les cheveux et le faire arrêter. Mais plonger dans la masse soyeuse de sa chevelure fut encore plus troublant et la manœuvre se changea malgré elle en caresse, les boucles brunes s’enroulant voluptueusement autour de ses doigts. Elle déglutit en comprenant trop tard que sur André cela avait le même effet, un effet plutôt…encourageant.


Son père quand à lui se planta face au bureau, furieux.
- « Comment osez-vous parler ainsi, fils dénaturé ! Je ne vous ai pas inculqué des principes pour que vous les fouliez ainsi en paroles, comme de vulgaires billevesées ! Et j’entends à ce que vous continuiez de respecter ce qui fait l’honneur des Jarjayes aussi je vous somme, non, je vous ordonne de présenter vos excuses à André dans les plus brefs délais !!»

La foudre parut tomber au milieu du salon. Bouche bée, elle resta complètement sonnée pendant quelques secondes. Des…excuses ?! Mais qu’est-ce que c’était que cette histoire ! De quoi parlait-il…et André qui n’arrêtait pas un instant de la tourmenter, de…Confondue, Oscar sentit soudain un pan de sa robe de chambre s’ouvrir doucement…

- « Intolérable ! Vous m’entendez ? Intolérable de vous donner ainsi en spectacle, toute la domesticité commence à en faire des gorges chaudes ! Et il a fallu que ce soit Grand-Mère qui vienne me conter toute l’histoire car elle n’en peut plus non plus cette pauvre femme ! »

Elle voulut répliquer mais l’autre versant de son vêtement l’abandonnait tout aussi sûrement…

- « Et croyez-vous qu’il me soit agréable d’apprendre de pareils ragots de si bon matin ? Pour m’entendre dire que vous êtes fier de vous être si mal conduit avec André en plus ! Alors que ce garçon est un modèle de dévouement, vous devriez avoir honte. »

Oscar se sentit glisser dans le brouillard la plus total, ne comprenait pas un traître mot du flot de paroles qui se déversaient sur à elle car bien plus attentive à paraître stoïque, à cause de ce qui se passait sous la table : un souffle délicieusement saccadé fut soudain très près de ses genoux suivies de deux mains larges et chaudes qui se traînèrent jusqu’à ses hanches. Affreusement lentes et sensuelles pour venir se saisir de ses vêtements déjà mis bien mal en point…
Effarée, elle eut beau serrer frénétiquement les jambes, une  pression attira ses pantalons vers l’abîme dévoilant peu à peu sa peau à ce souffle caressant. Après une très héroïque mais brève résistance le vêtement ne tarda pas à tomber sur ses chevilles…bonté divine ! Non !
Mais quel démon le tenaillait, ce…Il n’allait quand même pas faire…ça…Il n’allait pas oser !

Si.

- « Des…romanichels, voilà pour quoi nous passons à cause de vous ! Et je ne veux pas savoir qui est le fautif car pour moi c’est vous mon fils, vous seul qui devez assumer toutes les fautes de cette lamentable situation ! »

Mais bon sang quelle situation…celle qu’elle vivait était autrement plus dramatique, merveilleuse : André dégageait ses jambes de toutes entraves et achevait de les mettre nues, sans qu’elle puisse rien faire…

- « Grand-Mère s’obstine à me faire croire qu’André est seul en cause mais je ne veux rien savoir, rien entendre ! Vous êtes un Jarjayes, c’est donc à vous de donner l’exemple ! Non mais de quoi avez-vous l’air avec vos disputes, pouvez-vous me le dire ? Même si ce terme vous déplait je le redis : des chiffonniers, oui ! Vous avez l’air de chiffonniers André et vous. Prenez-vous cette demeure pour une place de marché ? Je ne tolère pas que l’on crie de cette façon sous mon toit aussi vous allez régler dans l’heure ce différent avec lui ! Et je ne tiens pas savoir ce qui vous oppose, sachez-le.»

Oscar essaya de sortir de la tornade embrumée qui dévastait son cerveau. Dispute…différent avec André ?
Oh mon dieu…Sa colère…leurs déchirements perpétuels…l’animosité qu’elle affichait ouvertement vis-à-vis du jeune homme ces dernière semaines…Voilà ce qui amenait son père ici ! Et pas le fait qu’elle éprouvait depuis cette nuit de tout autres sentiments pour c…Oh ! Elle pria pour que son coup de rein involontaire passât inaperçu : une chose légèrement liquide venait d’être déposée à la naissance de son genou.
Oscar avisa avec horreur que le pot de miel manquait sur le plateau…

- « Des enfants turbulents, irresponsables, voilà ma récompense ! Vous en prendre à André pour je ne sais quelle futilité sans doute, au point de remplir cette maison de vos stupides querelles ! »

Avec tout le maigre courage encore à sa disposition elle réussit à continuer de fixer ce père colérique, de ne surtout pas fermer les yeux sous l’approche d’une bouche venue capter ce nectar, par de très légères rotations de langue sur sa peau nue. Elle déglutit avec infiniment de peine.
Oh ça…tu me le paieras.
Je vais te tuer André, à la première occasion. Tu…me faire ça…à quelque pas de…je te hais ! Il faut que je résiste, il le faut…et ne compte pas sur moi pour me laisser prendre à tes…oooh !

Au-delà des affolantes dégustations elle perçut enfin les mains du jeune homme derrières ses genoux, qui la caressaient là du bout des doigts pour affaiblir ses dernières réserves…Elle sentit ses jambes défaillir, prêtes à s’ouvrirent…Ses paupières s’alourdissaient et dut violemment crisper ses mâchoires pour continuer de soutenir le regard mécontent du Général.

- « Et ne prenez pas cet air accablé avec moi je vous prie, cela ne vous va pas du tout ! Inutile de me mentir vous vous êtes particulièrement mal conduit mon fils ! Comment avez-vous pu vous laisser aller à ces mesquineries, un Jarjayes doit se montrer infiniment plus digne dois-je vous le rappeler ! Oui vous devriez avoir honte ! »

Avec résolution et la plus insoutenable tendresse André écarta soudain un genou guère réticent pour venir déguster plus à son aise quelques gouttes qui tombaient, ses cheveux frôlant l’intérieur de ses cuisses.
Oh mon dieu…je vais mourir, c’est décidé.
Je vais m’évanouir et tant pis pour le scandale, ça m’est égal. C’est…trop bon, je…. Misérable, traître…oooh…jamais je n’ai vécu quelque chose d’aussi horriblement excitant, fabuleusement… Inconfortable…gigantesque…

Elle s’accouda au bureau comme un noyé à sa planche de salut quand la bouche du jeune homme remonta sans attendre le long de sa jambe ouverte…

- « Oh Mon Dieu, oui… »
- « Quoi ? Qu’avez-vous dit ? Vous reconnaissez enfin la stupidité de votre conduite ?»

 
Elle lança un regard embué qu’elle espéra peu révélateur sur les ravages que connaissait son corps.
Elle ne savait même plus ce qu’elle disait. Elle ne savait plus ce qui se passait dans cette pièce. Elle avait laissé échapper un cri, mais elle ne savait pas lequel. Uniquement concentrée sur ce qui se passait sous cette table…et vaguement, très vaguement sur ce que lui demandait son père.

- « Ai-je bien entendu ? Vous admettez enfin vous être mal conduit ? Et bien, au moins cette conversation n’aura pas été vaine pour une fois ! A présent vous allez me promettre de tout faire pour arranger la situation avec André, en Jarjayes que vous êtes ! »
- « Pa…par…don ? »
- « Je vous préviens je ne sortirai pas d’ici tant que je n’aurai pas obtenu votre promesse sur ce point précis ! »

Quoi…La signification des mots se coinça définitivement dans un des rouages de son cerveau : la caresse liquide et un peu tiède du miel fut déposée sur le haut de sa cuisse, près du pli tendre de l’aine aussitôt aspirée de manière fondante et méthodique pour n’en laisser la moindre goutte. Horrible traître…Et elle, qui ne valait guère mieux…elle avança son bassin vers cette langue dévastatrice qui apparemment ne comptait pas en rester là…

- « Alors ? J’attends ! Reconnaissez-vous vos fautes ? »
- « Je…quoi ? Reconnaître ? Je…oui Père…je b…bien sûr… »
- « Parfait ! Et vous promettez de vous conduire en digne fils n’est-ce pas ? »
- « Je…j…év…évidemment… »

Elle ne savait même pas ce qu’elle venait de promettre, mais elle promettait. Sans discuter.
Alors que l’intérieur de sa jambe était assidûment dégusté…Elle sursauta violemment.

- « Oh ! »

L’air soudain méfiant et terrible du Général de Jarjayes acheva d’affoler les pulsations de son pouls, elle crut défaillir pour de bon cette fois. En un geste de survie elle appuya son front sur ses poings liés en prière comme sous le poids d’un très intense accablement. Ce qui était le cas, mais pas pour les bonnes raisons : André venait de plonger sa langue sucrée en plein cœur de son intimité offerte…

- « Qu’est-ce qui se passe ! Que vous arrive t-il, vous êtes souffrant ? »
- « Ou..i, je…Non !! »

Répondre, trouver quelque chose à dire qui l’empêcherait de contourner ce bureau, de découvrir ce…oh non, bon sang mais quelle merveille ! Cette sensation…ce…Ooooh !!!
Une nouvelle impulsion de jouissance faillit la briser. Elle ne sut comment elle réussit à balbutier absolument n’importe quoi, sa mémoire avait du enregistrer quelques bribes.
- « Je…je vais…bien Père mais…je me repentais pour ma conduite. Vous aviez raison je…j’ai énormément…honte… »
Elle écrasa un énorme gémissement contre sa lèvre en sentant monter ce qui allait être une déferlante orgasmique menaçant de tout emporter sur son passage. André pesa davantage sur ses cuisses et enfouit son visage encore plus profondément.
A quelques pas de là, le Général couva le front apparemment contrit d’une pointe de contrariété.
- « Mais dites-moi…vous n’avez pas l’air en bien grande forme…Qui y a-t-il, vous vous sentez mal ? »
- « P…p…pas du tout… »

André embrassa la chair délicate, puis l’excita sous la pointe de sa langue…

- « Alors si tout va bien arrangez vous un peu que diable ! Vous êtes tout rouge et en nage. Peut-être couvez-vous une mauvaise fièvre…Voulez-vous que je fasse mander le Docteur Lassonne ? »
- « Oooh Mon Dieu oui ! »

Le Général eut un haut-le-corps de surprise tandis qu’Oscar sentait pulser une nouvelle vague de volupté, bien plus forte. Elle ne remarqua même pas ce ton de légère suspicion.

- « Etrange…Ce sera bien la première fois que vous appréciez autant les visites du Docteur Lassonne. Bon, peu importe, si votre état empire nous l’appellerons. Je n’aime pas les petites natures, pas besoin de s’émouvoir pour une bouffée d’humeur due à une nourriture un peu lourde sans doute. Cela va vous passer. A présent je vous laisse et veillez à ce que ce différent avec André soit le plus rapidement réglé, je compte sur vous ! »
- « Oooh oui… »
- « Pardon ?! Oui, bien…N’en faites pas trop tout de même, mon fils. Après tout André est votre subordonné, ne l’oubliez pas non plus ! »
- « Je…v…vous avez…raison, je n’oublie pas qu’il est…mon… »

Il alternait les pressions douces et fermes sur les fragiles parois de son sexe enflammé, se frayant un passage jusqu’à ce bourgeon si prêt d’éclore…
- « Qu’il est…mon… »
…pour du bout des lèvres l’attirer à lui, l’aspirer avec tendresse,…
- « Mon… »
…l’humecter sans relâche, à une vitesse grandissante, affolante…
- « M… »
…le sucer durement, très intensément…
Avant même que le Général de Jarjayes n’atteigne la porte en pestant d’exaspération, un torrent d’éclairs bleutés traversa les yeux d’Oscar et l’éblouit de milliers de petites lumières quand l’orgasme explosa sans détour sous une dernière et ferme pression de cette langue impitoyable.
Dès qu’elle fut seule elle plaqua ses mains sur sa bouche pour contenir le cri impudique qui résonna de manière étouffé durant de longues secondes, puis se laissa retomber, sans force…

Tu n’es qu’un fou…
A présent je crois bien qu…non, je sais que je t’aime ; mais je vais te tuer…


Elle regarda André émerger le visage barbouillé de miel, l’air extraordinairement satisfait. Elle fut incapable de l’étrangler comme elle en rêvait. Elle était incapable de faire quoi que ce soit. Il fit mine d’être penaud mais son sourire en disant long.

- « Pardon Oscar…je…je n’ai pas pu m’en empêcher… »
- « La prochaine fois…essaie ! »
- « Mais quand je t’ai entendu parler ainsi à ton père, sur tes sentiments…le bonheur m’a fait tout oublier. Tu tiens à moi Oscar, tu tiens à moi à ce point ! »


Il la prit fougueusement dans ses bras mais il collait de partout…c’était…répugnant. Et elle adorait cela.
Elle devait être folle elle aussi.
- « André…espèce d’insensé je devrais t’occire ! Comment as-tu pu faire une chose pareille et...mon dieu c’était tellement bon ! »
Un frisson la parcourut quand elle entendit son rire au creux de son oreille.
L’amour c’était donc cela également, un rire qui résonne après tant de larmes versées.
Et elle se sentit heureuse d’être aimée…par un fou.
Qu’importe. Même si cela devait durer le temps d’un battement de cœur ou toute une vie c’était lui qu’elle voulait, lui tout entier.
Elle protesta malgré tout pour la forme.
- « Je vais vraiment avoir du mal à te pardonner ! Et ce soir…cette nuit il me faudra prendre ma vengeance je te préviens ! »
- « Oh oui…c’est vrai j’ai été terriblement cruel…Tu as raison mon amour punis-moi, que ta vengeance soit terrible…D’ailleurs tu devrais commencer tout de suite, par exemple m…Bon Dieu ! Non, pas encore ! »
- « Quoi ! »
- « Mais tu n’entends pas ? »
- « Je ne suis pas vraiment encore dans mon état normal, tu sais ! »
- « Grand-Mère ! Par tous les diables, elle vient ici ! »


La vieille dame ne prit même pas la peine de frapper et franchi le seuil avec une mine des plus féroces.
Elle fut tout de même satisfaite de pouvoir toiser son petit-fils, poings sur les hanches.
- « Ah, vaurien, tu es là ! J’espère que cette fois tu as compris au moins. Je suis contente que le Général se soit occupé de toi ! »
- « Co…comment ?! »
- « Ne fais pas l’innocent ! Je viens de l’avertir de ta conduite inqualifiable et je l’ai vu sortir d’ici il y à peine une minute ! Et je peux savoir pourquoi tu regardes ce bureau avec cet air d’ahuri ? En plus tu n’as même pas encore porté son petit déjeuner à ma petite Oscar, mais qu’as-tu donc dans la tête ! Bon, puisque c’est comme ça je vais m’en charger moi-même mais après tu te lèves de ce bureau, et tu vas faire des excuses, et au trot ! »


Elle vint cueillir le plateau et chercha bientôt en tout sens, marmonna pour elle-même.
- « Mais, c’est curieux…j’étais sûre d’avoir mis un pot de bon miel de fleurs sauvages, le préféré de ma chère petite et…Rhooooooo André !! C’est toi qui l’as mangé ! Ne nie pas tu en a plein la figure, vil chenapan ! Tu es vraiment désespérant ! »

Furieuse elle tourna les talons et lança un regard noir, les bras chargés.

- « Oui, oui tu peux faire cette tête ! Tu as raison de ne pas être fier, je vois le rouge monter à tes joues ! Et puis j’espère au moins que le sermon du Général t’aura servi à quelque chose ! Pour ça, les Jarjayes savent y faire n’est-ce pas ! »


Stupéfaite elle vit soudain un sourire céleste s’épanouir sur le visage du jeune homme. Il regarda ce bureau presque amoureusement et balança doucement son visage vers l’arrière, les yeux clos.

- « Ooooh oui… »

FIN





 
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